Agefi Luxembourg - décembre 2024

AGEFI Luxembourg 36 Décembre 2024 Droit / Emploi ParEvaCHRISTOPHE, Juriste, deCastegnaro Ius – Laboris L a Cour d’appel a répondu à cette question dans une affaire récente (1) . Cet arrêt permet ainsi de faire un récapitulatif des règles applicables en lamatière. Dans cette affaire, un employeur a, par courrier recommandé du 20 juillet 2018, licencié avec effet immédiat un salarié, ayant un peu plus de 2 ans d’ancienneté, pour une absence injustifiée à partir du 16 juillet 2018, soit 5 jours d’absence injustifiée, sans que l’employeur n’ait reçu lemoindre certificat d’incapacité de travail. Le salarié a contesté son licenciement et a saisi le tribunal du travail. Ce dernier a déclaré le licenciement fondé et justifié. En effet, il a retenu que le salarié ne bénéficiait pas de la protection contre le licenciement, telle que prévue par le Code du travail (2) , étant donné que ce dernier n’aurait pas prouvé que l’employeur avait reçu son certificat d’incapacité de travail pour la période du 16 au 20 juillet 2024. En ce qui concerne la lettre de licenciement, le tribunal a retenu que cette dernière était suffisamment précise et que le motif était suffisamment grave pour justifier un licenciement avec effet immédiat. Lesalariéafaitappeldujugementenaffirmant avoir informé son employeur de son arrêt de travail et ce dès le 1 er jour de son incapacité de travail et lui avoir envoyé son certificat médical par courrier simple lemême jour, de sorte qu’il aurait dû bénéficier de la protectionspéciale contre le licenciement prévue par le Code du travail. Par ailleurs, le salarié soutient que la lettre de licenciement n’énonçait pas avec précision les perturbations dans l’organisation du service qu’aurait engendrées son absence injustifiée. En outre, la faute reprochée ne serait pas suffisamment grave selon lui pour justifier un licenciement avec effet immédiat, étant donné qu’il s’agirait d’un fait unique et que la réalisation d’heures supplémentaires par ses anciens collègues n’aurait pas été due à son absence. Les arguments du salarié n’ont pas été suffisants pour convaincre la Cour d’Appel qui a confirmé le jugement. Le salarié doit apporter la preuve qu’il a res- pecté ses obligations légales pour bénéficier de la protection spéciale contre le licenciement La Cour d’appel a confirmé le jugement en rappelant qu’un salarié qui entend se prévaloir de la protection contre le licenciement prévue par l’article L.121-6 (3) du Code du travail doit, i) informer sonemployeur le jourmêmede samaladie ou de sa prolongation ii) communiquer à l’employeur au plus tard le 3 ème jour de son incapacité de travail un certificat de maladie attestant de l’incapacité et de sa durée prévisible. Elle rappelle à l’occasion de cet arrêt que le salarié qui a informé l’employeur de son incapacité le premier jour de son incapacité est protégé contre un licenciement jusqu’à minuit du troisième jour d’absence et que ce n’est qu’à l’expirationde cedélai que l’employeur recouvre son droit de licencier, s’il n’a pas reçu de certificat d’incapacité. La Cour d’appel précise également qu’il est de jurisprudence constante qu’afin de bénéficier de la protection spéciale contre le licenciement prévue par l’article L.121-6 (3) duCode du travail, le salarié doit rapporter lapreuveque l’employeur abien reçu le certificatmédical endéans ledélai légal de 3 jours. Le salarié ayant envoyé son certificat médical par courrier simple, il n’apas puprouver la réceptionpar l’employeur de son certificat d’incapacité de travail. Par ailleurs, la Cour d’appel précise que les attestations fournies par le salarié n’ayant pas évoqué l’éventuelle information qu’aurait donné le salarié à l’employeur le jourmêmede son incapacité, ce dernier n’a pas rapporté la preuve de l’avoir informé.Ace titre, le salariénepeut pas seprévaloir de la protection spéciale contre le licenciement. Cet arrêt rappelle également que l’attestation testimoniale est un moyen de preuve accepté par les tribunaux afin de prouver que le salarié a informé l’employeur de son absence et ce dès le premier jour d’absence. Une absence injustifiée de 5 jours consécutifs constitueunmotifgravepermettantàl’employeur de licencier le salarié avec effet immédiat La Cour d’appel approuve le tribunal du travail d’avoir jugé que le comportement du salarié d’avoir laissé son employeur pendant une semaine entière dans l’ignorance quant aux raisons de son absence et quant à ses intentions par rapport à la poursuite de la relation de travail est un fait d’une gravité suffisante pour justifier un licenciement avec effet immédiat compte tenudu fait de ladésorganisation causée au service de l’entreprise. La Cour d’appel précise également que le motif invoqué dans la lettre de licenciement était suffisamment précis, étant donné que cette dernière fait état non seulement d’une absence injustifiée à partir du 16 juillet 2018, mais explique en quoi cette absence était de nature àperturber l’organisationdu service. La Cour d’appel rappelle, qu’il n’est pas requis au niveau de l’analyse de la précision des motifs que l’employeur indique en détail les conséquences engendrées par l’absence injustifiée reprochée. L’analyse de cette perturbation est à effectuer dans le cadre de la contestation de la gravité du motif invoqué, qui n’est pas contestée en l’espèce. En conclusion, cet arrêt nous rappelle : -Qu’il appartient ausalariéd’apporter lapreuvequ’il arespectésesobligationslégalespourbénéficierdela protection spéciale du licenciement, - Qu’une absence injustifiée d’au moins 5 jours peut être considérée, en fonction de la situation spécifique du salarié, comme une faute grave permettant à l’employeur de licencier pour effet immédiat. 1) Cour d’appel, 11 juillet 2024, CAL-2022-01044 2)Article L.121-6 (3) duCode du travail L’incapacité de travail constitue-t-elle une protection absolue ? Par Caroline LAMBOLEY, Headhunter, Lamboley Executive Search* L emonde du travail évolue, et avec lui, la démographie des em- ployés. Avec l’allongement de l’espérance de vie et la diminution des taux de natalité, la proportion de tra- vailleurs âgés de 55 ans et plus ne cesse d’augmenter. Pour les entreprises, inté- grer des collaborateurs seniors n’est plus une option, mais une nécessité stratégique. Les pays du G7 prévoient que d’ici 2031, les travailleurs âgés de 55 ans et plus représenteront plus de 25% de la main-d’œuvre. Pourtant, peu d’orga- nisations ont mis en place des pro- grammes pour intégrer ces travailleurs expérimentés dans leurs politiques de ges- tion des talents. Or, les entreprises qui reconnais- sent la valeur des travailleurs plus âgés peuvent combler leur carence en talents et créer des emplois durables, en tirant les compétences des travailleurs plus âgés à leur avantage. L’or gris des entreprises Les entreprises ciblent souvent leur recrutement et leurs actions de rétention sur les générations plus jeunes, en particulier les millen- nials et la génération Z. Pourtant, les collaborateurs plus âgés représen- tent une ressource précieuse trop souvent ignorée. Les entreprises qui s’appuient sur unemain-d’œuvre diversifiée, qui comprend des collaborateurs plus âgés, ont tout à gagner. Selon des études de l’OCDE, la diversité d’âge en entreprise per- met de réduire le taux de turnover et d’aug- menter la producti- vité. Ces avantages sont certainement à imputer à l’expertise des collabo- rateurs plus expérimen- tés, à leur capacité à éviter les erreurs récurrentes et à proposer des solutions éprou- vées, sans pour autant réinventer la roue. Un autre volet réside dans la transmission des sa- voirs. La transmissiondes compétences d’un salarié en fin de carrière est un défi majeur. Il convient de commencer par conserver en interne les connais- sances et le savoir-faire de ces experts, incarnés par lessalariéslesplusâgés.Lescollaborateursdecesgé- nérations ont accumulé non seulement des années d’expérience salariée,mais aussi denombreuses for- mations. Celles-ci, qui ont représenté un coût pour l’entreprise, ont également contribué à sa croissance. La transmission de cette expertise de génération en génération contribue à la performance de l’entre- prise.Ellepermetégalementàlanouvellegénération de se perfectionner en travaillant avec un expert re- connuen interne. Il s’agit d’un facteur demotivation important, qui permet de lutter contre le turn-over. Ajustetitre,lescollaborateursplusâgésonttendance à être plus stables, ayant généralement moins envie de changer d’emploi ou d’entreprise, et à s’adapter aux règles et pratiques de leur lieu de travail. Enfin, ils disposent souvent d’un vaste réseau de contacts, un atout crucial dans de nombreux secteurs. Déboulonner les stéréotypes Malgré tout, les seniors font souvent face à des pré- jugés sur leur supposée résistance au changement, leur faible performance ou leur manque de com- pétences technologiques. Ces stéréotypes ne reflè- tent pas la réalité et empêchent de nombreuses entreprises de bénéficier pleinement des atouts des travailleurs plus âgés. Si les seniors ne sont pas des «digital natives», beaucoup sont tout à fait capables d’utiliser les technologies. Toutefois, un soutien spécifique, comme des formations aux nouvelles technologies ou aux outils de communication d’entreprise, peut être nécessaire pour maximiser leur efficacité. Les seniors apportent des compétences et des expé- riences que les jeunes générations ne peuvent offrir en raison de leur manque d’expérience. Ils valori- sent plutôt le contact direct, souvent plus productif que les échanges numériques. En outre, les seniors tendent à être des travailleurs acharnés, prêts à s’engager sur le long terme. Promouvoir l’inclusivité et unemain-d’œuvre diversifiée Pour construire des équipes diversifiées et inclu- sives, les entreprises doivent prêter attention aux opportunités internes offertes leurs employés plus âgés. Trop souvent, ces derniers sont écartés des promotions, des possibilités de participer à des projets où leurs compétences pourraient pourtant être précieuses. Ils sont également fréquemment les premiers à être licenciés en période de réduc- tion des effectifs. Adopter une approche proactive permet ainsi de créer un environnement de travail accueillant pour tous. Cela inclut l’éliminationdespréjugés liés à l’âge et lamise enplacedepolitiques d’inclusion, comme des plans de formation continue, des programmes dementorat, une plan de carrière adapté… Ne faisons pas d’amalgames malheureux : les se- niorsne sont pasdes reliquesdupassé,maisdes res- sources précieuses pour l’avenir. Accepter cette réalité est non seulement un impératif économique, mais aussi une démarche éthique et sociale. * www.lamboley.lu Seniors, seigneurs ! L e 7 novembre, dans le cadre de l'éditiondes “Entrepreneurs’ Days - a gouvernance d'entreprise démystifiée: clés et enjeux”, de nombreux experts et ac- teurs de la scène entrepre- neuriale se sont réunis pour souligner l'importance cru- ciale d'une gouvernance d'entreprise efficace pour les TPE et PME. Organisé par la House of Entre- preneurship, cet événement amis en lumière des pratiques exem- plaires et des démonstrations concrètesdestinéesauxentreprises souhaitantmieuxappréhenderles fondamentaux de la gouvernance d’entrepriseetaméliorerleurspra- tiques afin de surmonter divers défis,unfacteurdéterminantpour le succès de toute organisation. Ce sont 180 participants qui ont pu assister à un keynote inspi- rant sur la démystification de la gouvernance d'entreprise, suivi d'une table ronde captivante sur les défis actuels de la gouver- nance, ainsi que des ateliers thé- matiques dédiés à des domaines clés tels que le cashmanagement, la transmission d’entreprise, la gestion de crise, la cybersécurité et la digitalisation. Chaque atelier, animé par au moins un expert et un entrepre- neur témoin, a permis aux inter- venants de partager leurs expé- riences et leurs meilleures pra- tiques, favorisant ainsi un échange riche en connaissances. Les témoignages et les partages d'expertise ont offert aux partici- pants unemeilleure compréhen- sion de l'impact d'une gouver- nance solide sur la performance des entreprises. Le Luxembourg continue de se distinguer enmatière de gouver- nance d’entreprise, se classant 5ème pays de l'UE selon les indi- cateurs de qualité de gouver- nance de la Banque Mondiale. Bien que cette position reflète le leadership du pays et l'incite à maintenir des standards élevés, Stéphanie Damgé, directrice Entrepreneur-ship à la Chambre de Commerce, a rappelé que «les crises récentes nous ont rappelé que nous devons être prêts à faire face à l'incertitude et à l'imprévu. Une gouvernance solide nous permet de naviguer à travers ces tempêtes avec résilience et agi- lité.» Elle a également souligné que «non seulement une gouver- nance solide renforce la résilience et laperformancedes entreprises, mais elle contribue aussi à un environnement économiqueplus stable et équitable». Les intervenants des Entrepre- neurs’ Days ont unanimement reconnu que la mise en place d’une gouvernance efficace est essentielle pour assurer la réussite et la pérennité d’un projet entre- preneurial, indépendamment de son contexte. Cette journée a servi de véritable plateforme d’échange, offrant aux entrepreneurs l’opportunité de partager leurs expertises et témoi- gnages concrets, dans l’optique d’améliorer leurs compétences en matière de gouvernance. De plus, la session de networking organisée en fin de journée a per- misdesinteractionsenrichissantes entreentrepreneursetexperts,ren- forçant les liens professionnels et contribuant au développement des entreprises participantes. Source : Chambre de Commerce La gouvernance d'entreprise démystifiée : clés et enjeux ©ChambredeCommece

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