Agefi Luxembourg - octobre 2024
AGEFI Luxembourg 34 Octobre 2024 Droit / Emploi ParAnnieE LFASSI ,PartneretKyllianT ALBOURDET , Associate - département Dispute Resolution & Employment, Baker &McKenzie Luxembourg U n récent arrêt de laCour d’Ap- pel de Luxembourg a inquiété les professionnels dudroit en prononçant l’irrecevabilité d’un appel formé enmatière de faillite, de quoi réveil- ler de vieilles interrogations quant à la forme de ces appels particuliers. Aucoursde l’annéepassée, la loi du7 août 2023 relative à la préservation des entreprises et portantmoderni- sation du droit de la faillite est venue apporter une petite révolu- tion au droit luxembourgeois des entreprises endifficultés. L’objectif, clairement affiché, de flexibilisation et de simplificationdes procédures visant à protéger les débiteurs à la santé financière fragile est mainte- nant mis à l’épreuve de la réalité, près d’un an après l’entrée en vigueur de la loi, le 1 er novembre 2023. Au cœur de cette réforme se trouve notamment l’in- troductiondeprocéduresnouvelles,mais également une réforme dudroit, bien établie, de la faillite. Cette réformedudroitdelafaillitecontientunenouveauté toute particulière dont le but est de fluidifier les pro- céduresde faillites et alléger leur volet judiciaire, tant sur la durée que sur son corollaire indissociable, les frais. Cette volonté, qui est l’aboutissement d’un pé- rilleux et laborieux chantier entamé il y a plus de 10 ans,esttoutparticulièrementcristalliséeparlamodi- fication de l’article 465 duCode de commerce (1) . Ilconvientderappelerquelasolutionprécédemment retenuepar cet article était de réduire ledélai d’appel à 15 jours en matière de faillite. Il s’agissait en effet d’assurer un traitement fluide des appels enmatière de faillite, sans compromettre toutefois les droits et garantiesdontjouitlejusticiable.Sil’effortpourassu- rer la célérité du traitement de la faillite est louable, force est de constater que cette solution comporte deux inconvénients majeurs. Le premier est que la petitessedudélaivientcontraindrelesdroitsdecelui qui aurait intérêt à faire appel du jugement rendu en matièrede faillite. Le risque est eneffet devoire rédi- gerdesactesd’appelshâtifsetdemoindrequalité.Le second, est quemême si le délai d’appel se voit dras- tiquement raccourci, il n’en demeure pas moins que la procédure d’appel en tant que telle demeure in- changée. Sous l’empire des dispositions de l’ancien article 465 du Code de commerce, l’appel était ainsi soumis aux exigences de laprocédure écrite, réputée commeayantunrythmeplusmodérépropreàl’écrit, mais également comme s’étalant en longueur et en frais afférents. Lanouvellemouturedel’article465duCodedecom- merce (2) est donc à applaudir en ce qu’elle fait d’une pierre deux coups, résolvant les deux écueils de l’ap- pel enmatière de faillite en prenant le contrepieddu principe préexistant. D’un côté, le délai pour former appelestramenéà40jours,etdel’autre,laprocédure d’appelestinitiéeparuneassignationàdatefixeetse voit soumise auprincipe de l’oralité. Autrement dit, le législateur ne fait pas l’amalgame entre vitesse et précipitation, fluidifiant d’une part la procédured’appel en elle-même sans pour autantprévoirundélaiexorbitantdudroit commun pour introduire ledit appel. Ce faisant, il garantit à l’appelant, à la foisun temps suffisant pour organiser sa de- mande et un avancement efficace de la procédure, dans une matière où lamaî- trisedu temps est un élément primordial. Toutefois,chaqueinnovationcomporteson lotd’ajustementsavantdepleinementdé- ployer ses effets. Lenouvel article 465 duCodedecommercenefaitpas exception à la règle. C’est ainsi que la Cour d’Ap- pel de Luxembourg a prononcé (3) l’irrecevabilité d’un appel contre un ju- gement prononçant la faillite. Cette irrecevabilité est motivée par l’absence du mode de comparution à date fixe dans l’acted’appel, enviolationdes nouvelles dispositions del’article465.Enstatuantainsi,laCourd’Appelrap- pellel’existencededeuxvoiesd’appelsparallèlesmais non concurrentes lorsqu’il s’agit de faillite : la pre- mière spéciale et propre à la faillite, la seconde de droit commun. Cette décision relance ainsi l’épineux débat sur un sujet aussi crucial que central ; qu’est-ce que «lamatière de faillite» ? Depuis plus d’un demi-siècle, la jurisprudence luxembourgeoise a adopté une position qui circons- crit largement le périmètre d’application de l’ancien article465duCodedecommerce.Lesdispositionsde ce dernier ne viennent en effet à jouer qu’enmatière de faillite, notion interprétée strictement. En effet, il s’agit de l’hypothèse où « la contestation n’aurait pu se produire sans l’avènement de la faillite, que lorsque la contestation trouve sa source dans cet état, elle doit être ré- solue d’après le droit spécial de la faillite » (4) . Les juges luxembourgeois ont également précisé que l’article465duCodedecommerce« nes’appliquepasau jugement qui a statué sur des contestations qui, bien que néesaucoursdelafailliteetintéressantlamassedelafaillite, ont cependant une cause étrangère à la législation sur les faillites et auraient pu naître indépendamment de la fail- lite. » (5) . Cette position fait écho aux décisions rendues enBelgique,dontlenouveaudroitdelafailliteluxem- bourgeois est fortement inspiré – ce qui est d’ailleurs constant dans la jurisprudence luxembourgeoise (6) . Ainsi, à titre d’exemple, les contestations nées avant la faillite qui sont relatives à l’existenced’une créance d’uncréancier contre le failli ouencorequi tiennent à préserverlesdroitspréexistantsd’uncréanciercontre le failli ne sont pas à considérer comme appartenant à la matière de la faillite, et ne sont pas sujettes aux dispositions de l’article 465 du Code de commerce. Ces dernières peuvent en effet naître indépendam- ment de l’existenced’une faillite et trouvent leur fon- dement dans des droits autres que le droit spécial de la faillite, en particulier le droit commun des obliga- tions. A contrario , les jugements prononçant la faillite ou tenant à son administration seront eux suscepti- bles d’être appelés selon lesmodalités définies à l’ar- ticle 465 duCode de commerce. Finalement,leprononcéd’irrecevabilitédansl’arrêtde la Cour d’Appel du 26 mars 2024, apparaît non pas comme une révolution en tant que telle sur le champ d’application de l’article 465 du Code de commerce, maiscommeentérinantsimplementsanouvellemou- ture. Le conditionnement de la recevabilité de l’appel àlaformeoralen’estainsinullementsurprenant,mais donnera sans nul doute lieu à de nombreux débats quant à la matérialisation de cette modalité, pour le moins originale, devant laCour d’Appel. 1)Ancienarticle465duCodedecommerce:« Toutjugementrendu enmatière de faillite est exécutoire par provision; le délai ordinaire pour eninterjeterappeln’estquedequinzejours,àcompterdelasignification. (…)» 2)Nouvelarticle465duCodedecommerce : « Toutjugementrendu enmatièredefailliteestexécutoireparprovision;ledélaipoureninterjeter appel est de quarante jours, à compter de la signification. L’appel relevé desjugementsrendusenmatièredefailliteestintroduitparexploitd’huis- sier contenant comparution à date fixe et est instruit et jugé à bref délai selon laprocédureorale. (…)» 3)Courd’appel,26mars2024N°59/24IV-COM 4)Courd’appel,12 juillet1965,Pas.20,p.30 5)Courd’appel,19novembre2003,Pas.32,p.430 6)Courd’appel,24avril1985,Pas.26,p.345etCourd’appel,4dé- cembre2019n°167/19IV-COM Les nouvelles conditions de la recevabilité des appels de l’article 465 du Code de commerce : Plus de peur que de mal S elon le dernier dé- compte duministère de la Justice/STATEC, 273 entreprises ont été décla- rées en faillite et 10 ont été li- quidées au cours du troisième trimestre 2024. Faillites L’économie réelle touchée Le nombre de faillites est en forte augmentationautroisièmetrimes- tre 2024 (273 contre 160 jugements au troisième trimestre 2023, soit +71%).Enexcluantlessociétéshol- ding et fonds de placements, la hausses’élèveà60%,cequimontre quec’estbienl’économieréellequi esttouchée.Aucoursdesneufpre- miers mois de 2024, le nombre de faillites est en hausse de 20% (837 contre697jugementsentrejanvier et septembre 2023). Cette évolu- tionpasse cependant à 10%si l’on fait abstraction des sociétés hol- ding et fonds de placements. Avec des pertes d’emplois en hausse D’après les premières estimations, lesfaillitesontentrainé2386pertes d’emplois salariés au cours des trois premiers trimestres de 2024, contre 1.897 pendant lamême pé- riode de 2023, soit une hausse de plus de 25%. Il faut remonter à 2013 pour retrouver des niveaux similaires voir supérieurs en termes de pertes d’emplois. Majoritairement (44%) dans le Secteur de la construction Le plus grand nombre de faillites (226) concerne les sociétés de type holdingetfondsd’investissement. Oncomptenéanmoins147faillites au niveau du secteur de la construction,soit28deplusqu’àla même période de 2023 (+24%). Les pertes d’emplois salariés sont estimées à 1.048 (+45%), soit envi- ron44%du total despertes totales d’emploissalariésliéesauxfaillites durantles3premierstrimestresde 2024. La branche du commerce déplore quant à elle 125 faillites pendant les trois premiers trimes- tres de 2024, soit 17 demoins qu’à lamêmepériodede2023(-12%),et environ427pertes d’emplois sala- riés (+75%). Les faillites se chiffrent à 90 dans l’Horeca, 10 faillites supplémen- taires comparé à lamême période de 2023 (+13%), avec pour consé- quencequelques311emploissala- riés perdus (+6%). Liquidations Les liquidations sont en forte baisse au cours des trois premiers trimestres2024(-81%).40%desso- ciétés liquidées durant la période sous revue sont des sociétés hol- ding et fonds de placement. Tous ces thèmes peuvent être consultés dans le Dashboard «Faillites et Liquidations» du STATEC, publié le 10 octobre 2024. Les sta- tistiques sur les faillites se basent sur le relevé des décisions judiciaires, issu du Registre de commerceetdatantdu7octobre2024pourles données les plus récentes. Li resurhttps://lc.cx/Ai0Uc5 Source : STATEC Faillites en hausse au 3 e trimestre 2024, liquidations en forte baisse Par Caroline LAMBOLEY, Headhunter, Lamboley Executive Search* A lors que l’automatisation, l’intelligence artificielle et les technologies émer- gentes transforment rapidement les industries, les compétences d’aujourd’hui pourraient devenir obsolètes demain. Face à cette évolu- tion, comment rester compétitif et s’adapter ? La réponse réside dans le dévelop- pement de certaines compétences humaines qui débloqueront tout le potentiel dans un environnement de travail hyper-digital et la création d’une marketplace de talents. Les compétences à l’ère de l’industrie 5.0 Dans unmonde de plus en plus digitalisé, les com- pétencesprofessionnelles évoluent àun rythme sans précédent.Aujourd’hui, la capacité à collaborerdans des environnements virtuels, à exploiter lesdonnées de manière efficace et à maîtriser de nou- veaux logiciels est devenue cruciale. L’agilité technologique, c’est-à-dire la capacité à s’adapter rapidement auxnouveauxoutils et technologies, est désormais indispensa- ble pour rester compétitif. Les carrières linéaires, autrefois la norme, sont désormais révolues, remplacées par des rôles fluides et mouvants. Pour prospé- rer dans ce nouvel environnement, s’inscrire dans une dynamique de croissance et d’ap- prentissage continu est indispensable. Cetteapprocheagilepermetaux professionnels d’évoluer en fonctiondes besoinsdes organisa- tions et des tendances dumarché. Avec l’automatisation croissante des tâches routinières grâce aux outils d’intel- ligence artificielle, les compétenceshumainespren- nent une nouvelle importance. L’esprit critique, les capacités analytiques et stratégiques deviennent inestimables. Ces compétences permettent depren- dre des décisions éclairées, d’identifier des oppor- tunités et de résoudredesproblèmes complexes, des aptitudes que les machines ne peuvent pas encore imiter.Parallèlement, les compétences relationnelles restent irremplaçables. Développer l’intelligence émotionnelle, qui englobe la communication, l’em- pathie et la gestion des relations interpersonnelles, est essentiel pour se distinguer sur le lieu de travail. Ces compétences sont particulièrement valorisées dans des contextes comme lementorat et la gestion deprojets, où la capacité à inspirer et àmobiliser une équipe est cruciale. Lesentreprisescherchentdescollaborateurscapables de naviguer dans des environnements divers et de gérer efficacement les relations humaines, même à distance.Lacapacitéàtravaillerenéquipe,àgérerles conflitsetàpromouvoiruneculturedecollaboration et de respect est plus précieuse que jamais. Lamarketplace de talents : un changement de paradigme pour l’engagement et le développement des compétences Une marketplace de talents est un espace dédié au seinde l’entreprise qui rassemble toutes les opportu- nités de développement, y compris les offres d’em- ploiinternes,lesressourcesdeformation,lesmissions temporaires, ou encore les possibilités de mentorat. Au fond, elle incarne une philosophie managériale où la transparence redéfinit lesdynamiques entre les employésetleurorganisation.Cetespacecollaboratif permet aux préférences individuelles de semanifes- ter à travers des recommandations personnalisées pourlesopportunitésinternes.Lamarketplacedeta- lents soutient les initiatives de planification straté- gique existantes en offrant des informations sur la disponibilitédescompétences.Atitred’exemple,une entreprisepourraitexploitercesdonnéespourrecru- ter des talents spécifiques. Enréponseàlademandecroissantepouruneforma- tion personnalisée, une marketplace de talents bien déployéepeutdémocratiserl’accèsàdiversesoppor- tunitésetpermettreauxemployésdepoursuivredes expériencesdeformationpratiquesetpersonnalisées. Les collaborateurs peuvent ainsi développer des compétences en lien avec leurs objectifs de carrière. En permettant aux employés d’accéder à une va- riété d’opportunités, lamarketplace soutient l’iden- tification de nouveaux domaines de compétences et la mise en œuvre de solutions créatives. Les en- treprises peuvent ainsi bénéficier de nouvelles idées et approches, tout en développant leurs collabora- teurs afin de s’adapter rapidement aux change- ments dumarché. * www.lamboley.lu Compétences et Marketplace de talents : «It’s a match !»
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