AGEFI Luxembourg - juillet août 2025

Juillet / Août 2025 5 AGEFI Luxembourg Économie Par Philippe LEDENT, Senior Economist, ING Belgique-Luxembourg C ompte tenude la brutalité de certainesmesures prises par l’administrationTrumpde- puis le début de sonmandat, mais aussi compte tenude l’incerti- tude qui les entoure, il n’est pas facile de déterminer quels en seront les effets macroéconomiques. Une chose apparaît de plus enplus claire : d’un point de vue budgétaire, le compte n’y est pas. D’un côté, les tarifs douaniers et le Department of Government Effi- ciency (DOGE). De l’autre, le One BigBeautiful Bill (OBBBA) cher (dans tous les sens du terme) auprési- dentTrump.Lesunssontcenséscompenserl’énorme déficitlaisséparl’autre.Maisaufinal,l’effetnetrisque d’êtreunecroissanceplusfaibleetunedettepublique américaine restant sur une trajectoire inquiétante. Déficit abyssal Les politiques fiscales duprésident Trumpdevraient avoir des répercussions importantes sur le déficit fé- déral américain et la croissance économique globale. Tout d’abord, la situation budgétaire des États- Unisn’estpasbonne.Mêmeaprèslepicdudéfi- cit lié au Covid durant la période 2020-2022, le gouvernement américain continue de dépenser bien plus qu’il ne perçoit de recettes fiscales. Le déficit fédéral s’élève à 6,7 %du PIB, tandis que la dette publique nette, qui représentait 35%du PIBilya20ans,devraitdépasser100%duPIBau cours de l’exercice fiscal en cours. Les inquiétudes concernant la tra- jectoire budgétaire sont de plus en plus vives, les États-Unis ayantperduleurratingtriple A auprès de S&P, Fitch et, pas plus tard que le mois dernier, Moody’s. En outre,l’OBBBAprolongera et élargira les réductions d’impôts considérables que leprésident Trumpavait consen- ties en 2017, lors de son premier mandat. Le Congressional Budget Office estime que cela ré- duira les recettes fiscales de 3 700milliards de dollars aucoursdesdixprochaines années, tandisque les ré- ductions de dépenses proposées ne permettraient d’économiser que 1 300 milliards de dollars, laissant ledéficitprimaire(horscharged’intérêt)plusélevéde 2 400milliards de dollars. À première vue, il s’agit d’un énorme cadeau fiscal, mais il ne faut pas oublier que la majeure partie du projet de loi n’est qu’une extension des réductions d’impôts de 2017, qui devaient s’éteindre à la fin de cette année. Ainsi, bien qu’il fasse couler beaucoup d’encre rougepour les indicateurs budgétaires à long terme, il ne génère aucune impulsion positive pour l’activitééconomiqueaméricaineparrapportauxten- dances déjà enplace. Bonnes etmauvaises nouvelles La bonne nouvelle, si l’on peut dire, est que les tarifs douaniers du président Trump génèrent déjà des re- cettesfiscales.Enoutre,laDOGEgénèredes«écono- mies d’efficacité », même si celles-ci sont très modestes, puisqu’elles s’élèvent à moins de 200 mil- liards de dollars. Si ces initiatives peuvent contribuer à combler le trou financiercrééparl’OBBBA,ledéficitaméricainrestera important et le niveau d’endettement continuera à augmenter, surtout si l’on considère l’augmentation continuede0,1à0,2pointdepourcentageduPIBdes dépenses liées simplement à la démographie. En outre,lacombinaisondecespolitiquesestsusceptible de nuire à la croissance économique à court terme, ce quirisquederendretropoptimisteslesprojectionsof- ficielles enmatière de déficit et de dette. Eneffet,l’OBBBAest,dansl’ensemble,susceptiblede peser sur la croissance, les réductions d’impôts sup- plémentaires (au-delà de l’extension des réductions d’impôtsdéjàenvigueurdepuis2017)étantcompen- sées par les réductions de dépenses qui pèsent lour- dementsurlesoutienauxinvestissementsdurableset aux soins de santé. Les droits de douane vont frapper la croissance américaine Quant aux droits de douane, en plus de générer des recettes, ils visent à encourager la relocalisation de la productionverslesÉtats-Unis,cequistimulelacrois- sance à long terme, protège la propriété intellectuelle et renforce la résilience des chaînes d’approvisionne- ment. Toutefois, le résultat à court terme sera une combinaisondeprixplusélevéspourlesconsomma- teurs, qui réduiront le pouvoir d’achat des ménages, et de bénéfices plus faibles pour les entreprises, qui absorberont une partie des coûts. L’embauche et l’in- vestissement ralentissent déjà, et des signaux d’alerte indiquent que la croissance de l’investissement s’es- souffledansuncontexted’incertitudeéconomiqueet géopolitique accrue. En conclusion, un ralentissement de la croissance américaine de 2,5%en 2024 à unemoyenne de 1,5% en 2025-2026 ne serait pas surprenant. Une telle tra- jectoire serait inférieurede 0,3 à 0,4point depourcen- tageàcequiestprévudanslesprojectionsbudgétaires officielles.Dansdetellesconditions,ledéficitresterait égal ou supérieur à 6 % du PIB pendant la majeure partie de la décennie à venir. Par conséquent, le ratio dette/PIBcontinueraitd’augmenterd’environ2points de pourcentage ou plus par an. Il sera intéressant de voirsilemarchéobligataireestprêtàaccepterdetelles évolutions.C’estentoutcasluiquiauralederniermot. Le pari osé des finances publiques américaines L es 24 et 25 juin 2025, le Premier ministre, Luc Frieden, le Vice-Premier ministre, ministre des Affaires étrangères et du Commerce exté- rieur, Xavier Bettel, et la ministre de la Défense, Yuriko Backes, ont participé au Sommet de l'OTAN à La Haye. Face aux menaces et la dégradation de l’environnement sécuritaire, notamment la guerre d’agression russe qui se pour- suit en Ukraine, les 32 Alliés ont décidé un nouveau et ambitieux plan d’inves- tissement de défense. Dans un esprit de solidarité et d’unité, les membres de l’OTAN se sont engagés en consensus à investir 3,5%dans les besoins essentiels en matière de défense et 1,5 % en matière de sécurité civile d'ici 2035. Cet engagement permettra auxAlliés de réaliser les paquets d'objectifs capaci- taires dans le cadre duprocessus de pla- nification de l’OTAN et de disposer des forces nécessaires pour assurer la défense et dissuasion collectives, et en même temps de renforcer la résilience nationale. Le calendrier fixé garantit la flexibilité nécessaire, tout en respectant la souveraineté des États membres. La revue des objectifs d’ici la fin de la décennie est importante pour tenir compte des évolutions technologiques et géopolitiques. Dans ce contexte, le Premier ministre a déclaré : « Assurer notre sécurité com- mune est essentiel pourmaintenir notre paix, notre liberté et notre mode de vie. La décision d’aujourd’hui, portée par tous lesAlliés, devra êtremise enœuvre de manière flexible et à un rythme pro- gressif durant la décennie à venir. Il s’agira de renforcer notre sécurité tout en assurant des retombées économiques et sociales en faveur des citoyens et entreprises luxembourgeois. » Lors du dîner de travail du Conseil OTAN-Ukraine dans le cadre de la ses- sion des ministres des Affaires étran- gères, le Vice-Premier ministre Bettel a dit : « Ce qui se passe en Ukraine impacte directement la sécurité de notre continent et la protection de nos conci- toyens. Ce n’est pas une crise lointaine, c’est une guerre en Europe. Notre sou- tien est motivé par un intérêt commun : défendre l’Ukraine, c’est défendre les principes fondamentaux qui assurent notre propre paix et prospérité. » Yuriko Backes, lors du dîner des minis- tres de la Défense de l’OTAN, a souli- gné : « Augmenter notre effort de défense est un investissement dans notre sécurité. Il s’agit d'investir de manière ciblée dans des capacités à valeur ajoutée en valorisant les atouts respectifs des Alliés. C’est ainsi qu’on renforce le pilier européen de l’OTAN» Source : ministère d’État Luc Frieden, Xavier Bettel et Yuriko Backes au Sommet de l'OTAN à La Haye « Un investissement dans notre sécurité » ©ME www.atoz.lu Your trusted partner for tax strategy Founder & Member of the world’s largest independent tax network

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