Agefi Luxembourg - octobre 2025
AGEFI Luxembourg 44 Octobre 2025 Informatique financière L eWorld Payments Report 2026 publié le 25 septembre par le Capgemini Research Institutemet en lumière la pression croissante qui pèse sur les banques pour moderniser leurs services aux commerçants face à la concurrence de PayTechs (1) plus agiles. Ces dernières ont été créées spécifique- ment pour fournir des solu- tions technologiques qui facilitent le paiement. Dans cette 21 ème édition, le rap- port révèle que les banques font face à un défi de taille, avec des niveaux de satisfac- tion particulièrement faibles chez les petites (15 %) et moyennes entreprises (22 %). Pourtant, 66 % des commer- çants privilégient encore les prestataires traditionnels pour leurs besoins en matière de ser- vices financiers, ce qui repré- sente une opportunité majeure. Les banques ont relégué au second plan les services aux commerçants, invoquant la réduction des marges, la com- plexité croissante des infrastruc- tures et des coûts opérationnels élevés, laissant ainsi le champ libre aux PayTechs. Alors que 70 % des commer- çants accordent une grande importance à la fiabilité des paiements et des infrastructures dans un environnement digital, seules 19 % des banques se disent confiantes dans leur capacité à fournir ces services. De même, 69 % des commer- çants veulent une intégration rapide et fluide, mais seulement 13 % des dirigeants de banques estiment que leur établissement est pleinement capable de déli- vrer un tel service. Le rapport souligne également les difficultés majeures rencon- trées lors de l’intégration des commerçants par les banques, qui peut prendre jusqu’à sept jours et coûter en moyenne jusqu’à 496 dollars. À l’inverse, les PayTechs permet- tent aux commerçants d’être opérationnels en moins de 60 minutes pour seulement 214dol- lars. Cette lenteur et cette com- plexité font perdre du chiffre d’affaires et de la patience aux commerçants, qui deviennent alors des clients à risque. « Alors que de nombreuses banques privilégient l’émission de cartes au détriment de l’ac- quisition de commerçants, la prise en charge de ces derniers présente des lacunes qui per- mettent à des concurrents agiles et digitaux de gagner des parts de marché, explique Jeroen Hölscher, responsable mondial des services de paie- ments chez Capgemini. » « Avec 40 % des commerçants prêts à changer, le message est clair : les banques risquent d’être exclues de l’écosystème marchand. Pour se redresser, elles doivent éliminer les fric- tions qui coûtent du temps et de l’argent aux commerçants, et exploiter les possibilités offertes par l’IA générative. Celles qui agiront rapidement et placeront les commerçants au cœur de leur stratégie seront les plus à même de rivaliser avec les PayTechs dans une nouvelle ère du commerce. » Les PayTechs en voie de remporter la course de l’innovation En matière d’innovation, les PayTechs devancent les banques, creusantl’écart.Parexemple,70% des PayTechs ont déployé l’or- chestration des paiements – un levier clé pour le routage intelli- gentdestransactions–contreseu- lement 47%des banques. Par ail- leurs, 41%des banques déclarent avoir adopté l’IAgénérative dans leurs opérations, contre 60 % des nouveaux entrants. LesPayTechsfaçonnentégalement les attentes du marché en s’ali- gnantsurlesévolutionsréglemen- taires : près de la moitié d’entre elles adoptent enpriorité lesmon- naies numériques de banque cen- trale et les stablecoins, et 59%s’in- téressent aux cadres d’identité numérique,contrerespectivement 23%et 38%des banques. Les lacunes en matière de pré- vention de la fraude et de traite- ment des paiements constituent un autre axe d’amélioration. Seuls 26 %des dirigeants du sec- teur bancaire se disent confiants dansleurcapacitéàoffrirunepré- vention avancée de la fraude et une sécurité des données. Les commerçants ressentent for- tement cette pression, déclarant des pertes d’environ 2 % de leur chiffre d’affaires total dues à la fraude, et jusqu’à 9 heures d’in- terruption annuelle à cause du manquedefiabilitédes systèmes. Au cours de ladernièredécennie, les transactions de paiements dématérialisées au niveau mon- dial ont quadruplé, près de 90 % ayant lieu dans les environne- ments du retail et du B2C. En 2024, les volumes sont estimés à plus de 1,6 trillion, avec des pro- jections dépassant 3,5 trillions d’ici 2029. À l’échelle mondiale, les paie- ments instantanés et les porte- feuilles digitaux gagnent du ter- rain, passant de 13 % en 2020 à 25 % en 2024 dans le mix des paiements.Àl’inverse, lapart des cartes devrait passer de 65 à 52 % sur la même période, même si le nombre total de transactions par carte continue d’augmenter. La région Asie-Pacifique est en tête, avecprès de 800milliards de transactions depaiements déma- térialisées en 2024 et une crois- sance attendue de 21 % en 2025. En comparaison, l’Amérique du Nord a enregistré environ 256 milliards de transactions depaie- ments dématérialisées en 2024, avec une croissance plus modé- rée (7%) prévuepour l’année sui- vante, les cartes continuant de dominer lemix des paiements. Les banques doivent saisir l’opportunité La hausse des volumes de trans- actions de paiements dématéria- lisées dans l’e-commerce fait du service aux commerçants une opportunité majeure pour les banques afin de renforcer leurs liens au-delà du simple traite- ment despaiements. Les banques peuvent s’appuyer sur leurs atouts uniques, notamment la confiance, la puissance de leurs fonds de roulement et leur pré- sence historique, pour regagner des parts demarché. Les commerçants citent la réputa- tion de marque des banques (78%), leur stabilité perçue et leur présence à long terme sur le mar- ché(49%),ainsiqueladiversitéde leur offre de produits financiers (46%) par rapport auxPayTechs. Les commerçants se disent prêts à revenir vers les prestataires tra- ditionnels si les banques et four- nisseurs de paiement proposent des services àvaleur ajoutée inté- grés et adaptés à chaque secteur, comme l’intégration avec les pla- teformes de livraisonpour la res- tauration oudes programmes de fidélitépour les enseignes dedis- tribution. Huit commerçants sur dix seraient même prêts de reve- nir vers une banque si elle pro- posait tous les services d’une PayTech aumême prix. Rapport: https://short.do/ZSe4i8 1) Dans le cadre de cette étude, le terme «PayTechs» désigne les entreprises qui déve- loppent et fournissent des solutions de traite- mentdespaiements,notammentlespaiements mobiles, les transactions sans contact, les por- tefeuilles numériques et les passerelles de paie- ment.Celainclutlesprestatairesdeservicesde paiement (PSP), les facilitateurs de paiement (PayFacs) et les éditeurs de logiciels indépen- dants (ISV) proposant des capacités de paie- ment intégrées, adaptées à des besoins métiers ouàdessecteursspécifiques. PayTechs : Les banques risquent de perdre en pertinence auprès des commerçants World Report Series 2026 World Payments Report :LQQLQJ EDFN PHUFKDQWV PHDQV SOD\LQJ GLƪHUHQWO\ The (not-so) silent takeover: Par John HUTTON, responsable de l’efficacité des paiements, LexisNexis® Risk Solutions C haque année, plus de 4 mil- liards d’euros sont perdus à cause de la fraude sur les paiements en Europe. Des pertes de cette ampleur érodent la confiance et causent des préjudices financiers tant aux entreprises qu’aux consommateurs. Le 9 octobre 2025, le règlement de l’Union européenne sur la vérifica- tion du bénéficiaire (VoP) occupera le devant de la scène. Il introduit un dispositif de sécurité destiné à ga- rantir que les paiements parviennent à leurs destinataires. En imposant des contrôles en temps réel qui font correspondre les noms des bénéficiaires avec les numéros de comptes bancaires internationaux (IBAN), le règle- ment vise à réduire les vulnérabilités exploitées par les fraudeurs et à apporter de nouveaux niveaux de transparence et de sécurité à l’écosystème des paiements en Europe. Les enjeux sont importants pour les banques et les entreprises. La conformité est plus qu’une obliga- tion légale. C’est l’occasion de protéger sa réputa- tion et de renforcer la confiance dans le monde numérique d’aujourd’hui. Les banques, les prestataires de services de paie- ment (PSP) et les organisations sont confrontés à de nouvelles obligations de conformité en raison de cette réglementation.Mais ils peuvent aussi en tirer profit. Ce changement est l’occasionde renforcer la sécurité des paiements et d’améliorer l’efficacité opérationnelle. Pour réussir cette transition, il faut bien comprendre les implications du règlement et adopter une stratégie de mise en œuvre proactive et bien structurée. Qu’est-ce que la vérification du bénéficiaire (VoP) ? La VoP est un processus en temps réel dans lequel le nom du bénéficiaire fournit par le payeur est comparé au nom enregistré pour l’IBAN dans la banque du destinataire. Les PSP sont tenus de communiquer le ré- sultat de cette vérification au payeur avant d’autoriser le paiement, en indiquant s’il y a une correspondance, une correspondance proche, aucune correspondance ou si la vé- rificationn’est pas possible. Ceprocessus vise à prévenir la fraude aux paie- ments push autorisés, à réduire les paiements mal dirigés et à promouvoir une plus grande transparence et une plus grande confiance dans l’écosystème des paiements. Certains pays, comme la France, la Belgique, l’Italie et les Pays-Bas, ont déjàmis en place des systèmes VoP sur une base volontaire au ni- veau national. Avec ce règlement, c’est la première fois que la VoP sera appliquée dans l’ensemble de la zone euro. Les clients ne paieront pas de frais pour ces contrôles. Il existe une option de non-participation pour les entreprises clientes qui effectuent des paie- ments de masse, tandis que la conformité est obli- gatoire pour les paiements uniques initiés par l’intermédiaire d’API. Implications pour les banques et les prestataires de services de paiement Les institutions financières doivent relever une série dedéfis opérationnels et techniques pour se confor- mer au mandat de VoP. Les banques devront inté- grer les contrôlesVoPdirectement dans chaqueflux d’initiationde paiement, y compris les portails ban- caires en ligne, les applications mobiles et les solu- tions de paiement basées sur desAPI. Les réponses que les banques présentent aux utilisateurs doivent être claires et accessibles, selon les orientations de la Banque centrale européenne. Les banques doivent éviter d’utiliser un langage technique et faciliter la compréhension des résultats par les utilisateurs. La VoP introduit une nouvelle étape dans le par- cours de paiement. Ce processus supplémentaire peut créerdes frictions lorsdespaiements s’il estmal géré, enparticulier s’il est sourcede confusionous’il conduit à l’abandon de la transaction.Les banques doivent fournir aux utilisateurs un retour d’infor- mation en temps réel sur l’état de laVoP et s’assurer qu’elles fournissent des explications claires encasde correspondanceproche oudenon-correspondance. L’éducation des utilisateurs est essentielle. Les par- ticuliers et les entreprises doivent comprendre les risques associés à l’autorisation de paiements sans vérification et être conscients des implications. Ce message à l’écran pourrait être la dernière chance d’empêcher une victime d’une escroquerie d’en- voyer de l’argent à un fraudeur. Laresponsabilitéestunautreaspectquinécessiteune gestionattentive. Si unpayeur choisit d’effectuerune transaction à la suite d’un résultat sans correspon- dance ou qui est impossible à vérifier, la responsabi- lité des pertes dues à la fraude ou à des paiements mal dirigés peut passer de la banque aupayeur. Les banques doivent communiquer ces risques de manière transparente et s’assurer que le consente- ment du client est documenté avant de procéder à la transaction dans de telles circonstances. Sur le plan technique, les banques sont tenues de mettre en œuvre l’API VoP conformément aux lignes di- rectrices du Conseil européen des paiements et de vérifier que leurs processus sont conformes aux normes de messagerie ISO 20022. Les banques doivent également être en mesure d’indiquer le statut VoP dans les fichiers de masse soumis par les entreprises clientes par l’intermé- diaire des normes EBIC (Electronic Banking Inter- net Communication Standards) ou des canaux de paiement d’hôte à hôte. Implications pour les organisations Les trésoriers d’entreprise et les équipes financières doivent procéder à une évaluation complète de leurs processus actuels en tenant compte de la nou- velle réglementation. Ils doivent revoir les formats des fichiers de paiement demasse, mettre à jour les procédures pour prendre en compte les indicateurs VoP dans les soumissions de fichiers et intégrer les chèques VoP dans les systèmes existants de plani- fication des ressources de l’entreprise (ERP) et de gestion de la trésorerie. Bien que les entreprises clientes puissent renoncer à laVoPpour les transactions demasse, cela accroît l’exposition à la fraude et le risque d’atteinte à la ré- putation qu’elle entraîne. Par conséquent, de nom- breuses organisations choisiront probablement de mettre en œuvre la VoP en tant que pratique stan- dard pour protéger leur entreprise, leurs parte- naires et leur réputation. Recommandations stratégiques pour une transition en douceur Pour se préparer au mandat de VoP, les organisa- tions doivent mettre en place une stratégie de grande envergure impliquant la technologie, les processus et les communications. La première étape consiste à évaluer tous les flux de paiement actuels afin de déterminer où les contrôles VoP de- vraient être incorporés. Les institutions doivent utiliser ces résultats pour dé- velopper un plan clair et réalisable qui inclut les inté- grations techniques nécessaires, telles que le déploiement des API VoP et la mise à jour des sys- tèmes ERP pour maintenir l’exactitude des données. Ilestessentield’informerlesclientsetlepersonnelsur lesnouvellesexigencesenmatièredeVoP.Ils’agitno- tammentdeclarifierlefonctionnementduprocessus, d’expliquer chaque résultat de vérification et de dé- tailler les implications de ces résultats, en particulier en ce qui concerne la responsabilité. Une fois le sys- tèmeopérationnel,lesorganisationsdoiventsurveiller régulièrement les données de réponse de laVoP afin d’identifier les nouvelles tendances, d’affiner la lo- gique de correspondance et d’améliorer continuelle- ment l’expérience de l’utilisateur. Le mandat de VoP est une mesure importante pour améliorerlasécuritéetlatransparencedespaiements électroniquesenEurope.S’ilimposedenouvellesexi- gences en matière de conformité, il offre également des possibilités de moderniser les systèmes de paie- ment,deréduirelafraudeetderenforcerlaconfiance dans l’ensemble de l’écosystème financier. En se préparant avec diligence et en mettant en œuvre des stratégies solides, les institutions peu- vent remplir leurs obligations réglementaires, amé- liorer l’efficacité des paiements et protéger leur réputation. Allier confiance et technologie dans la lutte européenne contre la fraude aux paiements
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