AGEFI Luxembourg - septembre 2025

AGEFI Luxembourg 40 Septembre 2025 Droit / Emploi ParM e MarieBEHLEPONDJI,AvocatàlaCour,Counsel, CASTEGNARO-Ius Laboris Luxembourg D ubureaudes responsables des res- sources humaines aux prétoires en passant par l’Inspectiondu travail et desmines, le nombre de plaintes pour harcèlementmoral à l’occa- siondes relations de travail n’a eu de cesse de progresser depuis l’entrée envigueur de la loi en 2023 (1) (ci-après, la « Loi »). Les salariés qui s’opposent ou témoignent de faits de harcè- lement moral à l’occasion des relations de travail bénéficient désormais d’une protection consistante. Ainsi, tout acte de représailles à leur encontre encourt purement et simplement la nullité. Deux ordonnances rendues cet été apportent un éclairage intéressant sur laportéedu régimede pro- tection introduit par la Loi d’une part, en illustrant la notion de représailles et d’autre part, en précisant lesconditionsdanslesquelleslesalariéestsusceptible de bénéficier de cette protection. 1. Lamotivationdu licenciement déterminante dans la qualificationde l’acte de représailles Dans la première affaire (2) , le salarié avait accusé le bourgmestre de la commune qui l’employait d’actes deharcèlementmoral.Quelquesjoursaprèsavoirété saisidecetteplainte,l’employeuravaitinformélesala- riéqu’uneenquêteseraitdiligentéeparunprestataire externe tout en l’avertissant qu’une « sanction discipli- naire pouvant aller jusqu’à la résiliation du contrat de tra- vail » pourrait être prononcée en cas de « fausses accu- sations en lamatière ». À l’issue de cette enquête ayant conclu au caractère infondé des accusations, le salarié a été licencié avec effetimmédiatauxmotifsnotammentqu’ilavaitporté de « fausses accusations » et avait « rendu les faits publics dans le but d’envenimer la situation ». Lamotivation du licenciement faisait encore état d’une plainte déposée avec une « légèreté blâ- mable »dansl’intentiondeternirl’image de l’accusé. Le salarié a introduit une action en nullité du licenciement, esti- mant avoir été sanctionné pour avoir refusédesubirleharcèlementmoralqu’il avait dénoncé. En première instance, il s’estvureprocherdenepasrappor- ter la preuve que le licenciement constituait une mesure de repré- sailles et, à ce titre, a été débouté. Saisi du recours du salarié, le Président de la Cour d’appel a, quant à lui, fait une lecture totalement différente des faits de l’espèce. Tout d’abord, le magistrat a commencé par relever que, parmilesgriefsdelicenciement,figu- raient la médiatisation et le caractère infondé des accusations de harcèlement ainsi que la mauvaise foi du salarié. La décision rappelle à ce sujet que la Loiinstitueuneprotectiondusalariécontredesactes de représailles, dont notamment le licenciement, « en raisondes protestations ou refus opposés àun compor- tement de harcèlement moral » (article L. 246-4 duCode du travail). Sur cette base, le juge en a déduit qu’ad- mettre qu’un salarié puisse être licencié en raison du caractère infondé de ses accusations de harcèlement moral reviendrait àpriver d’effet laprotectionque lui accorde la loi contre d’éventuelles représailles. De surcroît, il retient que le fait que les accusations de harcèlementmoral ne soient pas établies à l’issue de l’enquête ne suffit pas à caractériser la mauvaise foi duplaignant, laquelle ne peut découler que de la connaissance par ce dernier de la fausseté des accu- sations qu’il porte. Le Président de la Cour d’appel a donc conclu à la nullitédulicenciementetordonnélaréintégrationdu salarié aumotif que : - l’employeur faisait explicitement grief au salarié « d’avoir déposé une dénonciation infondée de harcèlement moral[…] »,cequis’inscritenviolationdel’interdiction posée par l’article L. 246-4 duCode du travail et, - l’employeur n’avait pas rapporté la preuve que les accusationsdeharcèlementmoralportéesparlesala- rié étaient entachées demauvaise foi. Lamotivationdu licenciement adonc été à labasede la constatation faite par la juridictiondu travail que le salarié avait bel et bien fait l’objet d’un acte de repré- sailles et devait donc être réintégré. 2. Les circonstances factuelles peuvent matérialiser l’acte de représailles Dansladeuxièmeaffaire (3) ,cesontlescirconstanceset la chronologie des faits entourant lamesure de licen- ciementquiontportépréjudiceàl’employeur.Enl’es- pèce, Monsieur X s’était plaint d’une série d’actes de harcèlement moral qu’il imputait au Président du conseil d’administration et actionnairemajoritaire de la société qui l’employait. Après avoir mené une enquête interne et conclu à l’absence d’éléments corroborant le harcèlement dénoncé, l’employeur a licencié le salarié invoquant une série de « graves problèmes de comportements, d’in- subordination et plus généralement de manquements pro- fessionnels, ayant fortement affecté l’activité de la société ». Apriori, rien, dans la justification apportée ne laissait supposer que ladécisionde l’employeur était liée à la plainte du salarié. Pourtant, le Président de la Cour d’appelaprisenconsidérationl’ensembledescircons- tances ayant mené l’employeur à prononcer le licen- ciement et en a conclu qu’elles matérialisaient bel et bien l’acte de représailles. Enl’occurrence,lemagistratcommenceparconstater que plusieurs des griefs à la base du licenciement remontaientàplusieursmois,voire,plusieursannées auparavantetn’avaientjamaisdonnélieuàlamoindre mesure disciplinaire à l’encontre du salarié. La juri- diction en a conclu que l’employeur n’avait donc jamais envisagédemesure contre le salariéavant que ce dernier ne se plaigne de harcèlement. Il est intéressant de noter que c’est enanalysant plu- sieurs procès-verbaux de réunions du conseil d’ad- ministration et du comité de direction de la société que le juge est parvenu à cette conclusion (la ques- tionde l’accès du salarié à ces documents ne semble pas avoir posédedifficultédans cette affaire). Il res- sortait en effet de ces procès-verbaux que, pour les administrateurs et la direction, la taille de la struc- ture et la défiance qui s’était instaurée entre le plai- gnant et l’accusé ne permettraient plus une collabo- ration professionnelle harmonieuse à la suite des accusations de harcèlement portées par le salarié. Le comitédedirectionyévoquait encore lanécessité pour l’employeurde considérer la rupturede la rela- tion de travail, soit par la voie consensuelle, soit par la voie du licenciement. Le juge adéduit ducontenude ces procès-verbaux et de la chronologie des évènements que la décision de licencier le salarié avait été prise en réaction à ses dénonciationsetqu’àcetitre,cedernierétaitéligibleà laprotectioncontre le licenciement offertepar l’article L. 246-4 duCode du travail.Après avoir prononcé la nullité du licenciement, la juridiction a ordonné la réintégrationdu salarié. Ce qu’il faut retenir Ces deux décisions ont le mérite d’édifier les employeurs sur les erreurs à ne pas commettre lorsqu’ils envisagent de licencier un salarié concomi- tamment à une plainte pour harcèlement moral. S’il est évident que le simple dépôt d’une plainte pour harcèlementmoralneconfèrepasd’immunitécontre lelicenciement,iln’endemeurepasmoinsque,siune tellemesureestenvisagée,ladécisiondevrasefonder sur des motifs objectifs, réels et sérieux, sans lien de causalitédirectouindirectavecladénonciationeffec- tuéeparlesalarié.Desurcroît,l’absencedefondement des accusations de harcèlement moral ne pourra pas justifier la rupture du lien contractuel si l’employeur n’est pas en mesure d’établir que le plaignant avait pleinement conscience de leur caractèremensonger. Finalement, ces décisions sont aussi l’occasion de rappeler qu’un motif de licenciement doit toujours s’inscrire dans un contexte factuel chronologique- ment cohérent. 1) Loi du 29mars 2023 portant modification duCode du travail en vue d’introduire un dispositif relatif à la protection contre le harcèlement moralà l’occasiondesrelationsdetravail. 2) Président de la Cour d’appel, Ord. N°81/25 - VIII – TRAV du 26 juin 2025 3)PrésidentdelaCourd’appel,Ord.N°179/25-VAC–TRAVdu1er août 2025 Harcèlement moral : sanctionner l’auteur d’accusations infondées peut vous conduire à la faute ! L a sécurité financière des retraités reste un défi à l’échelle mon- diale, fragilisée par un environ- nement économique complexe, une inflation persistante et le vieillisse- ment des populations selon l’indice mondiale des retraites 2025 (Global Retirement Index) publié le 9 sep- tembre par Natixis Investment Managers (Natixis IM). Élaboré en collaboration avec CoreData Research, l’Indice mondialdesretraitesdeNatixis IM (Global Retirement Index) propose une analyse complète des conditions nécessaires à une retraite sereine. Au-delà des seuls aspects financiers, il prend en compte l’accès et le coût des soins de santé, la qualité de la gouvernancedupays, le climat, ainsi que lebien-être global des populations. Fondé sur 18 indicateurs ré- partis en quatre sous-indices—finances à la retraite, bien-êtrematériel, santé et qualité de vie—notés de 0%à 100%, il offreunpanoramadétailléde la situa- tion de chaque pays face audéfide la retraite. En2025,laNorvègeoccupelapremièreplaceduclas- sement avec un score global de 83 %, détrônant la Suisse (81 %), leader de l’année dernière, qui arrive désormaisen3 ème positionderrièrel’Irlande(82%).Le Danemark réalise laprogression laplus remarquable dans le top 10, passant de la 9 ème à la 5 ème place, tandis que la Slovénie fait son entrée dans le top 10 pour la toute première fois. Enfin, deux nouveaux pays font leur entrée dans le top 25 : la République slovaque (24 ème )etChypre(25 ème ),détrônantleJaponetlaFrance qui ont continué à voir leur classement baisser au cours des dernières années. « Les résultats de l’indice soulignent l’importance d’uneplanificationproactiveà tous lesniveauxpour assurer l’avenir des retraités. Partout dans lemonde, les gouvernements prennent déjà desmesures pour renforcer les systèmes de retraite, élargir les options etmieux protéger les actuels et futurs retraités.Mais la sécurité des retraites est une responsabilité collec- tive : les individus, les gouvernements, les institu- tions financières et les employeurs doivent tous contribuer à cet effort », déclare Sébastien Sallee (cf. portrait), responsable Belgique et Luxembourg chez Natixis IM. Le Luxembourg perd trois positons « Le Luxembourg conserve sa place parmi les dixpremiers duGlobal Retirement Index (GRI), bien qu’il perde trois positons et affiche une baissedescore,passantde78%à75%.Cebilan contrasté révèle que le pays maintient sa positiondeleaderenmatièredesanté etprogresseenqualitédevie,mais recule sur les volets bien-être ma- térieletfinances.LeLuxembourgse distingue particulièrement dans le domaine de la santé, où il conserve la première place et améliore son score d’un point, atteignant 94 % », précise Sébastien Sallee. « Le pays figure dans le top 10 pour chacun des trois indicateurs de santé. Il reste numéro un pour les dé- penses de santé assurées et grimpe de cinq places en espérance de vie, se classant septième grâce à une hausse de quatre pourcents. En revanche, le Luxem- bourg perd deux places pour les dépenses de santé par habitant, avec un score en baisse de 89%à 87%, maisdemeuretoutdemêmedansletop10(sixième). Malgréune couverturenationaleélevéeenassurance santé, l’accès aux soins reste difficile pour les per- sonnes sans emploi ou sans domicile fixe ». Sur le plan du bien-êtrematériel, le Luxembourg en- registre une chute de huit points, ce qui le fait reculer de six places à la 23 e position, son plus mauvais clas- sementparmilessous-indices.Leprincipalfacteurest l’indicateurduchômage,oùlepaysseclasse31 e après une baisse de 14 points, à 40 %. Le Luxembourg af- fichel’undestauxdechômagedesjeuneslespluséle- vés de l’Union européenne, avec une augmentation dunombrede jeunes sans emploi, ni en formation, et des programmes d’accompagnement peu adaptés aux besoins dumarché du travail. Par ailleurs, le pays perdquatre places dans le classe- mentdel’égalitédesrevenus,passantdela14 e àla18 e position, avec un score en baisse de 68 % à 64 %. Sur une note plus positive, le Luxembourg reste dans le top cinqpour le revenupar habitant, bienqu’il perde une place et se retrouve quatrième. Le Luxembourg perd également du terrain sur le sous-indice des finances, quittant le top 10 après une baissedetroispointsdepourcentageetreculantdesix placesàla14 e position.Cetteévolutions’expliqueprin- cipalement par la hausse de prêts bancaires non per- formants et la pressionfiscale, qui voient leurs scores diminuer respectivement dehuit et sixpoints. Les ré- sultats sont très contrastés dans ce domaine : le pays se situe en bas du classement pour la pression fiscale (36 e ) et les taux d’intérêt (35 e ), mais se distingue par une troisième place pour l’endettement public et une quatrième pour la gouvernance. Il intègre également le top 10 pour l’inflation, grâce à une hausse de 12 pointsquilepropulsede13placesdansleclassement, refletd’unetendancegénéraleàlabaissedel’inflation dans la zone euro. Malgréun score stablede 81%pour la qualitéde vie, le Luxembourg gagne quatre places et se hisse à la sixième position. Les progrès réalisés en biodiversité et habitat, facteurs environnementaux et eau et assai- nissementcompensentlesbaissesenregistréesenqua- litéde l’air et enbonheur. Le principal point fort est la biodiversité, oùun scoremaximal permet aupaysde grimper de six places et d’atteindre la première posi- tion. Le Luxembourg est un contributeur fondateur duGlobalBiodiversityFrameworkFund,quisoutient activement desprojetsde conservationdes espèces et de restaurationdes habitats. Lepays obtient également un scoreparfait pour l’eau etl’assainissement,intégrantletopcinqgagnantqua- treplacesparrapportàl’andernier.Enrevanche,l’in- dicateur des facteurs environnementaux reste faible, leLuxembourgstagneàla34eplacemalgréunelégère amélioration du score (de 47 % à 50 %). Enfin, une baisse de huit points sur la qualité de l’air fait reculer le pays de trois places à la 14e position. Les investisseurs particuliers confrontés à la fragilisationde la sécurité financière de leur retraite Selon l’enquête, quel que soit le classement de leur paysd’origine,lesparticuliersestimentquelasécurité financière de leur retraite pourrait être un objectif difficile à atteindre en 2025. Accablés par une infla- tion persistante, un environnement économique plus complexe et l’augmentation de la dette pu- blique, 43 % des investisseurs particuliers affirment qu’ilfaudraitun« miracle »pourgarantirlasécurité économique de leur retraite. Lesprincipauxrisquespesantsurlasécuritéfinancière des retraités en 2025 sont : 1. L’inflation : à l’échelle mondiale, l’inflation persis- tantecontinued’éroderl’épargne-retraite.66%d’entre eux déclarent épargner moins en raison de la hausse des coûtsquotidiens, 69%affirment que celaa réduit la valeur future de leurs fonds de retraite et 38%dé- clarent que l’inflation « tue » leurs projets de retraite. 2. Un effort d’épargne retraite encore trop limité : À travers lemonde, l’enquête révèle que 25%des per- sonnes interrogées craignent de ne jamais parvenir à épargner suffisamment pour leur retraite. 78 % des investisseurs particuliers reconnaissent que le finan- cement de leur retraite repose de plus en plus sur leurs épaules et beaucoup n’y sont pas préparés. Les objectifsd’épargnerestenttropmodestesetleshypo- thèsesdeplanificationnecorrespondentsouventpas aux revenus nécessaires pour vivre pendant 25 à 30 ans à la retraite. 3. Un système de retraite publique sous pression : l’augmentationdeladettepubliqueetlevieillissement delapopulationmettentàrudeépreuvelessystèmes de retraitenationaux.Un tiersdes investisseursparti- culiers dans le monde craignent que les prestations publiques ne soient réduites, ce qui reflète leurs in- quiétudes quant à l’impact des décisions politiques difficiles sur leurs revenus personnels. 4. Le vieillissement de la population : l’allongement deladuréedevieetlevieillissementdelapopulation créentunproblèmecroissantdedépendancedesper- sonnes âgées. Dans les pays de l’OCDE, le ratio mé- dian entre les personnes âgées de 65 ans et plus et les adultes en âge de travailler devrait passer de 32,5 % en 2024 à 59,3%en 2050. Dave Goodsell, directeur du Center for Investor In- sightdeNatixisIM,adéclaré :«Poursatreizièmeédi- tion, l’Indice mondial des retraites met en évidence une inquiétude particulièrement tangible en 2025 : celledenepasparveniràassurersasécuritéfinancière à la retraite. Les investisseurs sont confrontés à la convergence de facteurs personnels, démogra- phiques, économiques et réglementaires, qui rendent plus difficile que jamais la réponse à la question es- sentielle : quelles ressources seront nécessaires pour financer la retraite ? » Détailsde l’enquêtesurce lien ,https://lc.cx/6vDXlk Le Luxembourg reste dans le top 10 de l’indice mondial de la retraite

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