Agefi Luxembourg - février 2025

AGEFI Luxembourg 4 Février 2025 Economie / Banques Par Philippe LEDENT, Senior Economist, ING Belgique-Luxembourg L e taux neutre est un concept pu- rement théorique qui préoccupe beaucoup lesmarchés finan- ciers, enparticulier lesmarchés obliga- taires, depuis un certain temps. En effet, connaître le niveaudu taux neutre est important pour bien comprendre dans quellemesure les banques centrales peu- vent réduire les taux d'intérêt à l'avenir. Rappelonsd’abordquepour les marchés obligataires, il est extrê- mement important de connaître l'évolution des taux d'intérêt à court terme. En fait, les taux que l’on peut obte- nir sur une obligation anticipent les évolutions à venir des taux à court terme et donc le comporte- ment à venir des banques centrales. Une façonsimplede l’expliquer est la suivante : si un investisseur est persuadé que les taux d'intérêt à court terme, que l’on peut par exemple obtenir sur un compte épargne ou un compte à terme, tombe- ront à0%, il se contenteraprobablement d'unrende- ment obligatairede1à2%offert suruneplus longue période. Toutefois, si lemême investisseur est convaincuque les tauxd'intérêt à court terme ne descendront pas en-dessous de 2%, il est clairqu’il exigerades tauxd'intérêt nettement supérieurs à 2% pour les obligations à long terme,parexempleà10ans.Ilvoudraeneffet obtenir une prime de risque en plus du taux d'intérêt à court terme qu’il anticipe, en com- pensationde l’immobilisationde sonargent pendant si longtemps. Si l’on regarde la situation ac- tuelle, la banque centrale américaine, laRéserve fédé- rale, et laBanque centrale européenne (BCE) ont déjà réduit les taux d'intérêt à court terme. Pourlesmarchésfinan- ciers, la question clé est maintenant de savoir quel est le potentiel de baisse qui subsiste. Concept théorique… C’est ici qu’intervient le concept de tauxd'intérêt na- turel, également connusous lenomde tauxd'intérêt neutreou,enanglais,R-star.Brièvement,ils'agitd'un taux d'intérêt d'équilibre. Lorsque les taux d'intérêt se situent à ce niveau, la politiquemonétaire n'est ni stimulante ni restrictive. Actuellement, les banques centralesnormalisent leurpolitiquemonétaire, c’est- à-dire qu’elles baissent leur taux car l’inflation a di- minué, afin d’atteindre un niveau plus neutre, où la politique monétaire n’est plus un frein à l’activité. Il n'est donc pas étonnant que les marchés financiers soient extrêmement curieux de savoir quel est exac- tement ce niveau. Mais c'est là que les difficultés commencent. Il s'agit ici d'un concept théorique, qui ne peut être observé dans lapratique. Celadoit être calculé à l'aidedemo- dèleséconomiquesetsansgrandesurprise,ilsnedon- nent pas lemême résultat. …Qui évolue dans le temps Par ailleurs, le tauxneutredoit être réévalué réguliè- rement. Ainsi, au cours des dernières décennies, la démographie et le ralentissement de la croissancede laproductivitéontfaitbaisserleniveaudestauxd'in- térêt neutres. Rappelons ici qu’au cours des décen- nies qui ont précédé la crise financière de 2008, les taux d'intérêt à court terme en Europe n'étaient ja- mais descendus en dessous de 2%. Plus encore : au début des années 1990, des taux de court terme de près de 10%n’étaient pas rares. C'est difficile à ima- giner aujourd'hui. En fait, c’est un signal clair que les taux d'intérêt neutres sont aujourd'hui beaucoup plus bas qu'il y a 20 ou 30 ans. Mais récemment, l'opinion selon laquelle, depuis la pandémie, le niveau des taux d'intérêt neutres a de nouveau légèrement augmenté, gagne du terrain. Pourexpliquercela,lamembreducomitédedirection de laBCE, Isabel Schnabel, fait référenceaux investis- sementsmassifs qui doivent avoir lieudans la transi- tion énergétique, mais aussi dans l'intelligence artificielle et lanumérisation, deux facteurs qui pour- raient stimuler la croissance de la productivité. En effet, une demande de capital structurellement plus élevée et des gains de productivité croissants de- vraientêtreimplicitementassociésàdestauxd'intérêt neutres plus élevés. LaRéservefédéraleestégalementdecetavis.Tousles 3mois, les membres du Comité des taux d'intérêt de laFeddonnentuneestimationdel'évolutiondestaux d'intérêt à court terme dans un avenir lointain. Or, cetteprojectiondutauxàcourttermeadéjàaugmenté d'undemi pour cent au cours des deuxdernières an- néesets'élèveaujourd'huià3%.Certainsmembresdu Comité pensentmême qu'il est supérieur à 3,5%. Enzone euro, leniveaudu tauxneutre est plus faible: la BCE a récemment publié un rapport de recherche contenant de nouvelles estimations des taux d'intérêt neutres. Sur labasedesdernièresdonnées, laBCEes- timequeletauxd'intérêtneutredevraitsesituerentre 1,75% et 2,25%. Or, actuellement, le taux d'intérêt de référencedelaBCEestà2,75%.Ilestdoncforprobable que le taux de la BCE pourrait baisser encore un peu avant d'atteindre un niveau neutre, qui est l’objectif annoncé aujourd’hui. Amoins évidemment que de nouveaux chocs imposent une politique monétaire plus restrictive ou à l’inverse plus accommodante. Il est en effet assez rare que l’état de l’économie corres- ponde à l’état stable desmodèles économiques. Le taux neutre : une boussole pour les banques centrales O n January 20, PresidentDonald Trump signed an executive order tit- led “UnleashingAmericanEnergy” tounleashAmerica’s affordable, reliable energy andnatural resources and “restore Americanprosperity.”Beloware examples. Reassess the legality and applicability of the Endangerment Finding President Donald Trump signed an executive order directing theEPAto reassess the legalityandapplica- bilityof theEndangerment Finding, amove seenas a step toward dismantling federal environmental reg- ulations. TheCleanAirAct of 1963 didn’t initially list carbon dioxide (CO2) as an air pollutant, but a 2007 SupremeCourt ruling (Massachusetts v. EPA) paved theway for the EPA to regulate greenhouse gases. The 2009 EPA rule classifying CO2 as a harmful pol- lutant is criticized for relying on flaweddata and has led to higher energy bills and concerns about the sta- bilityoftheU.S.energygrid.The2022SupremeCourt decision cited theMajorQuestionsDoctrine, empha- sizing the need for agencies to have clear congres- sional authorization for significant actions, providing further grounds for challenging the Endangerment Finding. Reassessing the Endangerment Finding is seen as crucial for ensuring theU.S. remains compet- itive in the global economy and can focus on techno- logical advancements without the constraints of misguidedregulation.Theaimistoreturntotheorig- inal intent of the CleanAir Act and address genuine public health andwelfare risks. On January 20, President Donald Trump signed an executiveordertitled“UnleashingAmericanEnergy,” which directs EPAAdministrator Lee Zeldin to re- assess the legality and applicability of the Endanger- ment Finding within 30 days. This move marks a significant step towarddismantlingwhatmany con- servatives viewas anoverreachof federal power and amisinterpretationof theCleanAirAct. The Endangerment Finding, a rule that has largely flown under the radar formostAmericans, has been a cornerstone of federal environmental policy since 2009. It allows the EPA to classify carbon dioxide (CO2)asaharmfulpollutantundertheCleanAirAct, enabling the agency to regulate it. However, this rule has its roots in a series of legal battles that began long before itwas officially adopted. Abandon climate pollution regulations President Trump ordered EPA Administrator Lee Zeldin to decide by next week whether the agency couldabandonitsauthoritytoregulateclimatepollu- tion under the CleanAir Act. His decision stands to castEPAintoamonumentalfightoveritsabilitytore- duce carbon emissions, potentially reverberating be- yond Trump’s presidency. If Zeldin attempts to upend the 2009 scientific finding that underpins all greenhousegasrules—knownastheendangerment finding—hewouldriskbeingrebukedbythecourts. But if judges upheldEPA’smove to reverse the find- ing, it would accelerate Trump’s efforts to dismantle a host of climate rules enacted under President Joe Biden, while erecting legal hurdles for future admin- istrations thatwant to curb climate pollution. “I think they can do it, and I, and I just hope the ad- ministratoriswellbriefedsothathecanmaketheright decision,” said Myron Ebell, who led Trump’s EPA transitionteamin2017,inarecentinterview.EPAdid not respond to a request for comment. Trump issued a Day 1 executive order directing Zeldin and other agency heads to brief the White HousebyFeb. 19on“the legalityandcontinuingap- plicability” of the endangerment finding. The find- ing, issued during President Barack Obama’s first term,holdsthatgreenhousegasemissions“mayrea- sonably be anticipated to endanger public health or welfare.” It’s the prerequisite for CleanAirAct rules targeting heat-trapping pollutants such as carbon dioxide and methane. The finding originally per- tained to climate pollution from vehicles, but it openedthedoorforregulationsonpowerplantsand oilandgasinfrastructure.Anditcouldsupportfuture regulationonadditionalsourcesofclimatepollution, such as landfills, refineries and industrial plants. Getting rid of the finding would make scrapping EPAclimate rules amatter of routine paperwork, an expert said. Regulations could be undone through simple, swift rulemakings. No replacement rules wouldbe needed. “Taking away the 2009 endanger- ment finding would really make it almost a virtual formality to take down all the greenhouse rules for CO2andmethane,”saidJoeGoffman,EPA’sairchief under Biden. EPAwould still need to strip out sector-specific find- ings from rules written under a key section of the CleanAirAct—knownasSection111—hesaid.But whenthedustsettled,EPAcouldregulateoilandgas facilities for ozone-forming pollutants alone, and not formethane—greatly reducing requirements for in- dustry. And power plants that burn fossil fuels wouldn’t be regulated for carbon. Source : naturalnews ,https://lc.cx/-Dr4Af scientificamerican ,https://lc.cx/_UXNMW “UnleashingAmerican Energy” ParJeanKELLER,présidentduConseild’Administration Quaero Capital Luxembourg S.A. A vec son slogan «Drill Baby, Drill» et ses annonces tonitruantes, DonaldTrump semble avoir sonné le glas des énergies propres.Mais aupays de l’économie demarché, l’ar- gent reste le principalmoteur des décisions. Et à ce jeu-là, les énergies renouvelables ont encore l’avantage, d’au- tant plus que le reste du monde est bien engagé sur la voie de la transition éner- gétique. Le solaire pourra donc continuer à briller. La peur du retour en arrière Dès son investiture, le nouveau président américain a annoncé la fin des plans de soutien à la transition énergétique, un net assouplissement des différentes réglementationsdeprotectionde l’environnement et un retrait des Etats-Unis de l’Accord de Paris. Il est donc légitime de craindre un coupd’arrêt enmatière deprogressiondel’économieaméricaineverslaneu- tralité carbone. Leplanmassifderéductiondel’infla- tion (IRA) voté en 2022 pourrait également être par- tiellement démantelé, notamment les créditsd’impôt qui ont été un facteur de soutienmajeur pour le sec- teurdesénergiesrenouvelables.L’impactseraitnota- ble pour des industries comme les véhicules élec- triques,lespanneauxphotovoltaïquesdetoi- ture ou l’éolienoffshore. La réalité n’est pas si simple… Si ces annonces sont naturellement néga- tives pour la transition énergétique, il faut être conscient queDonaldTrumpn’est pas dans une situation très favorable pour imposer une sortie totale de la Convention-cadre des Nations unies sur le changement clima- tique ou une abrogation com- plètede l’IRA. Eneffet, il nedis- posepasd’unemajorité absolue dans le camp républicain et cer- tains Etats «rouges» dépendent économiquement de la transition énergétique, qui assure un grand nombred’emplois. Deplus, il n’est pas inutile de rappeler que Tesla, et donc Elon Musk, est l’un des premiers bénéficiaires des aides auxvéhicules électriques et aux stationsde recharge. On peut donc espérer que la réalité soit moins vio- lente que les annonces initiales. La demande augmente Ilfautégalementtenircomptedelaréalité:lesbesoins en électricité sont appelés à croître de 20%d’ici 2030, ne serait-ce qu’en raison de l’appétit insatiable de l’ogreIA.Or,lamiseenœuvred’installationsd’éner- gie renouvelable, qu’il s’agissedeparcs éoliens oude centralessolaires,estbienplusrapidequelaconstruc- tion de leur équivalent thermique. A titre d’illustra- tion, rappelons que la simple commande d’une tur- bine à gaz est soumise à un délai de livraison de 5 ans.Faceàl’urgence,l’énergiepropreestdonclaseule voie efficace. Ailleurs, l’engagement reste fort On a parfois tendance à l’oublier, même en Europe, mais lemondene se résumepas auxEtats-Unis. Il ne fautdoncpassurestimerl’importanceauniveauglo- bal du coup de frein américain. Tout d’abord, parce que, outre des raisons idéologiques, la position de Donald Trump s’explique en bonne partie par le fait que les USA disposent d’une forte capacité de pro- duction de pétrole et de gaz naturel. Tel n’est de loin pas le cas en Europe, où le passage à des énergies renouvelablesestaussiunegarantied’indépendance, comme le choc énergétique qu’a constitué la guerre en Ukraine l’a rappelé de façon brutale. Malgré la montée de la droite dure en Europe, il est donc peu probable que les ambitions du Green New Deal soient remises en cause de façon importante. L’argent est plus fort que les lois Mais le principal atout des énergies renouvelables tienttoutsimplementdansleurcoûtplusavantageux. Carsilasurviedecesindustriesdépendaittotalement des subventions publiques lorsqu’elles étaient nais- santes, tel n’est plus cas aujourd’hui. De fait, le coût minimum actualisé du MWh («Levelized Cost of Energy»)sanssubventionsestde$27pouruneferme éolienne onshore et de $29 pour une centrale solaire, mais grimpe à $45pour une installationà cycle com- binéaugazetà$69pourl’électricitéissueducharbon, pour exploser à $142 pour une centrale nucléaire (1) . Les énergies propres sont ainsi aujourd’hui sans conteste les moins chères et il ne fait donc guère de sens économique d’y renoncer. Un élanplus fort que la politique Si le pouvoir politique propose, ce sont finalement lesentreprisesetlesparticuliersquidisposent.Or,de très nombreuses sociétés présentes au niveau mon- dialontprisdesengagementsfortspourréduireleurs émissions. Que ce soit par pur souci éthique, pour répondre aux attentes des consommateurs ou pour éviter des taxes carbone, elles ont souvent entrepris des programmes à long-terme, qu’elles n’ont guère intérêt à remettre en causedans une vision court-ter- miste.Onenvoitconcrètementl’illustrationavecl’ac- cord qu’a conclu il y a quelques jours Microsoft au Brésilafind’acquérirdescréditscarbonedanslecadre d’unprojetdereforestationd’unesurfaceéquivalente à 3 fois la ville de Paris. Changement de leadership Et si lesUSArenoncent à leur rôle de précurseurs, ce sont la Chine et l’UE qui vont assumer le leadership danslaluttecontrelechangementclimatiqueetainsi gardersurlesrailslatransitionénergétiquemondiale. De fait, la Chine a investi plus de $ 34milliards dans des projets climatiques et a déjà atteint avec 6 ans d’avance sonobjectif d’émissionspour 2030.Onpeut donc espérer que, poussé par un sursaut d’orgueil national, Donald Trump ne voudra pas longtemps faire figure demauvais élève. 1) Source : Lazard 2024 Shine, Baby, Shine

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