Agefi Luxembourg - mars 2025

AGEFI Luxembourg 4 Mars 2025 Banques / Assurances Suite page Une Cependant, le pic de hausse des taux de la Banque centrale européenne ayant été atteint en septembre 2023 (4,00%), avec les premières annonces ou anticipations de baisse du taux di- recteur prochaines, — à 2,50% comme communiqué le 6 mars 2025 — la pression sur les prix des dé- pôts va revenir et devrait juguler les gains sur la marge nette d’intérêt. La plupart des banques vont donc sans doute s’orienter vers des voies de croissance d’autres revenus pour maintenir leur rentabi- lité et atteindre les objectifs de leurs plans stratégiques. Après des années 2023 et 2024, qui ont vu l’augmentation significa- tive du coût du risque en lien avec les événe- ments macroéconomiques, et les secousses du marché immobilier et de la promotion immobi- lière, nous constatons la recherche de crois- sance par des flux de revenus hors intérêts et par la réduction des dépenses. En effet, les banques commerciales continue- ront à maintenir leur surveillance des crédits accordés à la clientèle de détail et aux entre- prises dans un environnement de taux qui se stabilise mais qui se heurte au prix de l’immo- bilier national toujours élevé, malgré la correc- tion du marché des 18 derniers mois, ainsi qu’aux problématiques rencontrées par divers acteurs de la construction et de la promotion immobilière, l’un des moteurs de l’activité éco- nomique du pays. Les pistes de rentabilité pour 2025 Afin de stabiliser leur rentabilité, les banques en réflexion se préparent à différents choix stra- tégiques tels que : i) se concentrer sur leurs cœurs de métier les plus rentables en se sépa- rant des activités secondaires ou par réalloca- tion tactique des ressources y afférentes ; ii) augmenter les revenus en améliorant l’efficacité organisationnelle et opérationnelle, la tarifica- tion, l’acquisition et la fidélisation des clients ; ou bien iii) en améliorant les capacités de ges- tion des risques sur certains sujets clés. Ces stratégies nécessitent une importante ana- lyse sur le long terme tout en maintenant des coûts organisationnels et opérationnels à un ni- veau convenable. Cependant ces coûts restent en augmentation au sein de tous les établisse- ments de crédits majeurs en Europe, comme au Luxembourg. Nous observons des augmentations de charges principalement au niveau de la supervision pouvant être proportionnellement plus consé- quentes pour des structures moins matures ou moins internationales. Les investissements et les dépenses dans les domaines IT, Cyber et de digitalisation (protection, qualité et disponibi- lité des données clés financières et non-finan- cières) sont également en constante augmentation pour pallier les défis internes et externes, mais également se différencier des concurrents pour une expérience client toujours plus importante. Ces investissements ne sont pas seulement une réponse aux conditions économiques actuelles, mais un mouvement stratégique vers la sécuri- sation des services bancaires. Nous constatons également une augmentation des frais liés à l’attraction et à la rétention des meilleurs profils, qui deviennent de plus en plus spécialisés, sur un marché où la raréfaction des talents dans certains domaines se fait sentir. Enfin, dans un marché toujours plus compétitif, les marges s’érodent chez certaines banques pouvant résulter en une réorientation de cer- taines activités secondaires ou à l’acquisition de clientèle et de fusions afin d’atteindre des seuils critiques générant des flux de revenus satisfai- sants par économies d’échelles et présence sur le marché. L’acquisition et la cession d’activité : une piste de plus en plus exploitée La plupart de ces opérations, axées sur l’amé- lioration de l’efficacité, visent également à dé- velopper de nouveaux flux de revenus grâce à des produits et services financiers innovants. Comme énoncé, de plus en plus d’établisse- ments de crédit s’éloignent de segments moins rentables ou plus risqués. Les opérations de cessions d’activité permettent ainsi de dégager du capital à réinvestir. Dans cet élan, les banques ont re- cours aux opérations d’acquisi- tion d’entreprise comme un levier pour renforcer ou déve- lopper des activités rentables. Plusieurs tendances sur le marché des Fusions et Acquisitions (M&A) bancaires se dégagent actuel- lement. 1. Recherche de la taille critique Spécialement pour le secteur bancaire, la recherche d’une taille critique et des économies d’échelles reste le facteur prin- cipal des acquisi- tions du secteur. Cette tendance s’applique sur- tout aux marchés locaux et aux banques de taille moyenne, mais plusieurs transactions transfrontalières sont également at- tendues, comme nous l’avons vu dans le métier de la gestion de fonds récemment. 2. Renforcement du cœur de métier Le recentrage des établissements sur leur cœur de métier à haute valeur ajoutée est aussi un moteur des acquisitions et ventes stratégiques. Des banques avec des atouts particuliers dans des sous-secteurs tels que le financement de vé- hicules ou des domaines de la gestion de patri- moine et d’actifs, par exemple, sont susceptibles de procéder à des acquisitions pour renforcer leur business model. 3. Recherche de revenus centrés sur les com- missions Les fusions et acquisitions continueront d’être une voie vers une augmentation des services basés sur les commissions. Les banques tendent à vouloir rendre leurs revenus de moins en moins dépendants de la marge nette d’intérêts, considérant les baisses des taux directeurs amorcés sur la deuxième partie de 2024. Les métiers de banque privée ou de services aux fonds en sont de très bons exemples. 4. Acquisitions de capacités technologiques Les établissements bancaires continuent de faire face aux enjeux de digitalisation. Les transformations numériques, l’amélioration des mesures de cybersécurité et l’efficacité opéra- tionnelle sont à la pointe de cette poussée infor- matique, qui comprend également l’intégration de l’intelligence artificielle et du machine lear- ning pour rationaliser les services et améliorer l’engagement des clients. Les investissements technologiques ont en- traîné une augmentation marquée de l’engage- ment numérique des clients pour les établisse- ments de crédit. Même si, sur le marché luxem- bourgeois, ces opérations ont été limitées ces dernières années, l’appétit des banques pour les acquisitions ou partenariats avec les FinTechs devrait croître. Pour les banques, l’acquisition d’entreprises technologiques est le moyen d’ac- quérir des technologies et compétences inno- vantes, tout en multipliant les voies d’acquisition de clients. En particulier, les Fin- Techs peuvent séduire et plaire aux plus jeunes segments de clientèle. Pour les FinTechs, de tels accords fournissent non seulement du financement mais aussi un accès aux clients et aux données. Les banques sont de plus en plus en concurrence avec les grandes entreprises technologiques, et cela continue à encourager les investissements stra- tégiques dans les FinTechs, qu’elles voient comme un réel partenariat à long terme. 5. La stabilité et la rentabilité par le désinves- tissement Les désinvestissements non stratégiques et la rationalisation des portefeuilles sont devenus plus importants pour les entreprises de gestion de capital, en partie en raison des récentes tur- bulences et de l’incertitude accrue sur les mar- chés. Nous nous attendons à ce que cette tendance se poursuive, suite à une période pro- longée de consolidation générale du marché. Les banques chercheront ainsi à vendre des ac- tivités si elles s’attendent à obtenir des valorisa- tions plus élevées que le reste du groupe. Cela continuera d’être motivé par le désir de libérer du capital face à la pression sur la rentabilité et les exigences en matière de fonds propres avec l’application de la CRR 3 d’application depuis le 1 er janvier 2025. Par exemple, nous observons aussi que les banques se séparent de plus en plus de leurs portefeuilles de prêts non-perfor- mants au profit d’investisseurs spécialisés. En conclusion, nous devrions voir dans les pro- chains mois des opérations de cessions/acqui- sitions poussées par cette volonté des banques de renforcer leur modèle économique (rentabi- lité/profitabilité) en combinant un recentrage sur leurs activités clés, avec un focus croissant sur la récurrence des revenus et une stratégie d’amélioration de leur modèle opérationnel, que ce soit dans le service aux clients, ou leur organisation interne. * Antoine Le BARS (portrait), Partner, Banking and Capital Markets and Assurance Grégoire d’AVOUT (portrait), Partner Strategy and Transactions Alexandre WALHIN, Senior Manager, Assurance EY Luxembourg Rentabilité des banques du Luxembourg et sources de croissance La BCE abaisse son taux de dépôt, voit la politique monétaire "moins restrictive" L a Banque centrale euro- péenne (BCE) a annoncé jeudi 6 mars une réduc- tion de 25 points de base de son principal taux directeur à 2,5% et publié ses nouvelles prévisions économiques. "Le processus de désinflation est en bonne voie", écrit la BCE dans le communiqué accompa- gnant sa décision. "La politique monétaire devient sen- siblement moins restrictive", ajoute la BCE, un changement notable par rap- port à ses déclarations précédentes, selon lesquelles la politique moné- taire était "restrictive". Ce change- ment de terminologie suggère qu'une nouvelle baisse en avril n'est pas cer- taine, certains responsables de poli- tique monétaire plaidant déjà pour davantage de prudence. "Le changement de terminologie du communiqué de presse montre que notre approche devient plus évolu- tive", a commenté Christine Lagarde, présidente de la BCE, à l'occasion d'une conférence de presse. La diri- geante a en effet mis en avant l'incer- titude "énorme" et "omniprésente" qui limite les investissements des ac- teurs économiques et renforce la dé- pendance aux données de la banque centrale. "Si les données suggèrent qu'une baisse des taux est appropriée, nous baisserons les taux. Nous ferons une pause si les données le suggèrent", a résumé la présidente de la BCE. La décision du 6 mars a fait consensus mais Robert Holzmann, gouverneur de la Banque nationale d'Autriche, s'est abstenu lors du vote, a révélé Christine Lagarde. Prévisions Dans ses nouvelles prévisions, la BCE a revu à la baisse pour la qua- trième fois la croissance du produit intérieur brut (PIB) pour 2025, à 0,9% contre 0,7% sur l'année 2024. En 2026, la croissance est attendue à 1,2% et à 1,3% en 2027. "Les révisions à la baisse pour 2025 et 2026 traduisent un ralentissement des exportations et une faiblesse continue des investisse- ments, provenant notamment d’une forte incertitude concernant la poli- tique économique au sens large, et la politique commerciale en particu- lier", justifie la BCE. L'inflation pour cette année est atten- due à 2,3% contre 2,1% projetés il y a trois mois, ce qui reflète "une dyna- mique plus soutenue des prix de l’énergie", explique la banque cen- trale. Ces projections ont toutefois été arrêtées avant les nombreuses an- nonces de ces derniers jours, comme le vaste plan d'investissement euro- péen dans la défense ou les risques d'une guerre commerciale avec les Etats-Unis, et qui pourraient influer sur la trajectoire économique. Les marchés parient désormais sur deux nouvelles baisses de taux cette année. Défense L'institution a par ailleurs été interro- gée sur le plan de "réarmement" pré- senté le 4 mars par la Commission européenne, qui vise à mobiliser 800 milliards d'euros pour renforcer les capacités des Vingt-Sept en matière de défense. Soulignant qu'il était encore trop tôt pour que la BCE puisse porter une analyse plus précise, Christine La- garde a reconnu qu'une hausse des dépenses de défense et d'infrastruc- tures pourrait soutenir l'inflation et la croissance dans l'Union européenne. Ces investissements pourraient éga- lement avoir un impact sur la pro- ductivité, a ajouté la responsable. Christine Lagarde a par ailleurs dé- fendu l'efficacité de la transmission de la politique monétaire en dépit de la forte hausse des rendements de ces derniers jours, déclenchée par les es- poirs d'un endettement plus impor- tant en Allemagne et en Europe. "La BCE ne modifiera pas sa posture monétaire en réponse à des mouve- ments de marché à court terme", a déclaré la dirigeante. "Les rende- ments ont fortement progressé mais les écarts de taux (entre pays de la zone euro) sont demeurés contenus". Source : Reuters ©Reuters

RkJQdWJsaXNoZXIy Nzk5MDI=