AGEFI Luxembourg - juillet août 2025

AGEFI Luxembourg 4 Juillet / Août 2025 Économie L e climat des affaires au Luxembourg connaît une légère embellie, portée par la baisse des taux d’intérêt et un regainde confiance dans certains secteurs d’activité. Cette améliora- tion reste toutefois fragile et inéga- lement répartie. La confiance à moyen terme s’érode sous l’effet d’un environnement géopolitique incertain, d’une demande encore modérée et d’une complexité admi- nistrative jugée pénalisante. Face à cette dernière, les entreprises appel- lentmassivement à lamise enplace d’unguichet unique connecté aux différentes administrations. Ces constats ressortent de la 13ᵉ enquête duBaromètre de l’Economie, menée entre le 22 avril et le 14mai auprès de 580 entreprises luxem- bourgeoises d’aumoins six salariés. Après deux années sous la barre des 50 points, le score global* du Baromètre repasse enfin au-dessus de ce seuil sym- bolique. La hausse de 2,1 points par rap- port au semestre précédent reflète une légère améliorationdes perspectives d’ac- tivité, d’emploi et d’investissement. Le débutdel’assouplissementdelapolitique monétaire européenne en 2025 donne un peu d’air aux entreprises, mais des dispa- rités sectorielles subsistent et le score reste toutefois loin des niveaux d’avant-crise (63,3 au 1 er semestre 2019). « Ce léger rebond du climat des affaires est encourageant, mais il reste extrêmement pré- caire » , note Carlo Thelen, Directeur Général de la Chambre de Commerce. « Les entreprises avancent avec prudence, freinées par des incertitudes persistantes liées aux tensions géopolitiques, par le ralentisse- ment du commerce mondial, et par des contraintes structurelles ». La confiance repart à la baisse La confiance à moyen terme des déci- deurs dans l’avenir de leurs entreprises reste stabledepuisfin2022, prochede son niveauleplusbasdepuis2019(73%).Mais trois secteurs accusent une forte baisse au cours des six derniers mois : les services financiers (-15,5 points, 70 %), les trans- ports (-14 points, 66%) et l’HORECA (-10 points, 63 %). Les petites entreprises (<10 salariés) sont les moins confiantes (69 %). A l’inverse, l’industrie, secteur le moins confiantilyasixmois,rebonditfortement (+27,5points,83%),potentiellementporté par des orientations européennes favora- bles à la réindustrialisation. Il est désor- mais le plus confiant. Le secteur de la constructionfaitface,luiaussi,àunregain d’optimisme (+10 points, 80%). Les décideurs interrogés sont cependant globalement toujours moins confiants dans l’avenir à moyen terme de l’éco- nomie luxembourgeoise que dans celui de leur entreprise. La confiance est retombée à un niveau historiquement bas (65%), avec de fortes disparités selon la taille des entreprises : 58 % pour les très petites entreprises (de 6 à 9 per- sonnes) contre 86 % pour les grandes structures. Dans les services financiers et le transport, elle recule. L’HORECA reste le secteur le moins confiant (60 %). Concernantl’ activité ,lessixderniersmois ont été plus difficiles qu’attendus au secondsemestre2024.Seuls16%desdiri- geantsontconstatéunehaussedeleuracti- vité alors que 19 % l’anticipaient, et 29 % ont subi une baisse d’activité. La majorité des entreprises a connu une activité stag- nante ces six derniers mois, tendance qui devrait se poursuivre. Pour le semestre à venir,lesperspectivess’améliorentlégère- ment : 24 % anticipent une hausse d’acti- vité, contre 18%une baisse. Les perspectives de rentabilité et d’investissements préoccupantes Lesperspectivesde rentabilité restentfra- giles. Si 54 % des entreprises anticipent une stabilité, 24 % prévoient une baisse, notamment dans l’industrie et le com- merce (30 %). Ces perspectives mitigées se reflètent également dans les intentions d’ investissements : 58 % des entreprises prévoientdelesmaintenirstables,24%de lesbaisseret18%delesaugmenter.Àl’ex- ception de l’HORECA, la part d’entre- prises prévoyant une baisse des investis- sements augmente dans tous les secteurs. Après plusieurs semestres de recul, le niveau global d’investissement demeure donc préoccupant. « Sans relance ciblée et des dispositifs incitatifs adéquats, nous risquons de compromettre la capacité des entreprises à innover, se transfor- mer et rester compétitives » , déclare Christel Chatelain, Directrice des Affaires écono- miques. Les services financiers, en parti- culier, se montrent bien plus réservés : seuls 18 % envisagent d’augmenter leurs investissements. Côté emploi , les prévisions s’améliorent très légèrement : 70 % des entreprises comptent maintenir leurs effectifs, 18 % les augmenter et 13%les réduire. Les ser- vices (financiers et non financiers) restent lesmoteursdel’emploi.Laconstructionet l’HORECAsontmoinspessimistesquefin 2024, tandis qu’un quart des entreprises du transport prévoit une réduction de leurs effectifs. « Malgré un contexte écono- mique incertain, les entreprises font preuve de résiliencesurlefrontdel’emploi.C’estunsignal positif, mais qui reste précaire », conclut Christel Chatelain. Les investissements dans l’IAémergent doucement Pour 2025 et 2026, les prioritésd’investis- sement des entreprises restent similaires aux années précédentes avec, en tête, le renouvellementd’équipementsusagésou obsolètes (39 %) et la modernisation des équipements et installations (31 %). Les investissements liés à l’intelligence artifi- cielleémergenttimidement(11%),princi- palement portés par les plus grandes structures (jusqu’à 55%). «L’intelligenceartificiellereprésenteuneoppor- tunité majeure, mais sa diffusion reste encore trop limitée. Il est essentiel d’accompagner les PME pour qu’elles puissent elles aussi en tirer parti. Les nouveaux SME Packages-AI sont un signal positif dans ce sens », analyse Christel Chatelain. Les difficultés d’accès au financement concernent 3 entreprises sur 10 27 % des dirigeants d’entreprises indi- quentavoirrencontrédes difficultésd’ac- cès au crédit au cours des 12 derniers mois. Un niveau croissant depuis l’avant- crise sanitaire : 12 % en 2019 et 23 % en 2022. Les petites entreprises sont les plus touchées (35 %) et tous les secteurs sont concernés,enparticulierl’HORECA(47%, dont 18 % avec de fortes difficultés), les transports (34%) et la construction (29%). Simplification administrative : enjeu central pourmieux entreprendre Alors que le Gouvernement a fait de la simplification administrative l’un de ses axes prioritaires, les entreprises peinent à en percevoir les effets. Seules 3 % consta- tent une simplification des démarches au cours des 12 derniers mois, un chiffre en baisse, tandis que 35 % estiment que les procédures se sont complexifiées, un res- senti en hausse. Fait marquant : aucune entreprise de plus de 250 salariés n’a constaté d’allègement en la matière. Face àceconstat,laHouseofEntrepreneurship amenéuneétudequalitativeauprèsde50 entreprises luxembourgeoises afin de recueillirdestémoignagesconcretssurles obstaclesadministratifsrencontrésauquo- tidien.Enplus,laChambredeCommerce, en collaboration avec sa House of Entrepreneurship,aconsacrélapartiethé- matique de sonBaromètre de l’Économie du 1 er semestre 2025 à la simplification administrative afin de mettre en lumière les difficultés rencontrées par les entre- prisesetàidentifierlesmesuresattendues. Les retours qualitatifs ont permis d’iden- tifier lesdéfis lesplus fréquents, demieux cerner les attentes des entreprises et d’ali- menterdirectementl’enquêtequantitative du Baromètre de l’Économie, assurant ainsiuneparfaitecohérenceentrelesdeux voletsméthodologiques. Ces études qua- litativesetquantitativesontpermisdefor- muler des recommandations concrètes pour guider le Gouvernement dans la priorisationdesactionsàmettreenœuvre. Lesmesuresidentifiéesontététransmises au ministère de l’Économie sous forme d’unrapportdétaillé,venantenappuiaux efforts de simplification en cours. Cette démarche s’inscrit pleinement dans le cadredel’objectiffixéparl’accorddecoali- tion, qui prévoit une réduction de 25 % des exigences administratives pesant sur lesPME, et s’appuie sur une collaboration étroite et constructive avec leministère de l’Économie. « Dans le cadre de l’objectif de simplification ciblée porté par le Gouvernement, notre rôle, en tant que porte-parole des entreprises, est plus que jamais de faire remonter la réalité du terrain pour que les efforts de simplification répondent concrètement à leurs besoins » , souligne Stéphanie Damgé, Directrice Entrepreneurship de la Chambre de Commerce. Lorsqu’on interroge les entrepreneurs sur les moments clés de la viede l’entreprise àciblerenpriorité enmatièredesimplifi- cation administrative, 85 % d’entre eux demandent que le Gouvernement se sai- sisse en priorité des démarches adminis- tratives liées à la gestion courante de l’en- treprise et celles liées à la création d’entre- prises (47%). Créer une entreprise auLuxembourg: unparcours à simplifier d’urgence CréeruneentrepriseauLuxembourgreste un parcours complexe, souvent long et fragmenté.Aujourd’hui,lescréateursdoi- ventnaviguerentreplusieursplateformes etadministrations,cequipeutallongerles délais à 4 à 6 semaines avant de pouvoir légalement exercer une activité. L’objectif est clair : centraliser les démarches dans un parcours unique, fluide et centré sur l’usager, afinde réduire significativement le temps de créationd’entreprise. Gestion courante, complexité constante : un frein à la compétitivité Les résultatsde l’enquête sont sans appel: pour 71%des entreprises, lesdémarches administratives grèvent leur rentabilité. Si lesprioritésdesimplificationvarientselon les secteurs, les défis identifiés le sont de manière quasi-unanimes : en tête, la redondance des documents et informa- tionsàfournirauxdifférentesadministra- tions (un défi pour 73 %des entreprises), la perte de temps liée à des informations dispersées(72%),etlamultiplicitédespla- teformes et interlocuteurs (70%). Cependant, en se penchant sur les prin- cipaux défis considérés comme diffi- ciles àgérer par les entreprises, une autre perspective émerge. Au-delà de la lour- deur, c’est une logique administrative perçue comme punitive qui inquiète : près d’un tiers des dirigeants (29 %) dénoncent une approche centrée sur la sanction plutôt que sur l’accompagne- ment. Àcela s’ajoutent la complexité des démarches fiscales à remplir sans assis- tance (28 %) et l’absence de suivi en temps réel des démarches administra- tives soumises (28 %). « La complexité administrative est devenue un frein structurel à la compétitivité », regretteStéphanieDamgé. «Ilestimpératif de simplifier les démarches pour libérer du temps et des ressources au service de l’inno- vation et de la croissance. » Des priorités claires des entreprises enmatière de simplification En ce qui concerne les mesures de sim- plification , troispriorités sedégagent : en tête, ladisponibilitéd’unpoint de contact (guichet)unique,enligneetenprésentiel, connecté auxdifférentes administrations (jugé utile par 75 % des chefs d’entre- prises),lerenforcementdudroitàl’erreur (73 %) et la généralisation du principe Once Only demanière (71%). Ces propositions visent à alléger dura- blementlachargeadministrativeetàren- forcer la compétitivité des entreprises luxembourgeoises. « La simplification administrative ne doit pas être un objectif abstrait, mais une réalité tan- giblepourchaqueentreprise», résumeCarlo Thelen. « Bien pensée et coconstruite avec les acteurs économiques, elle permettra de réduire les coûts, de renforcer la compétitivité et de consolider l’attractivité du Luxembourg. C’est une condition essentielle pour bâtir une éco- nomieplusagile,plusrésilienteettournéevers l’avenir.LaChambredeCommerceestdisposée à continuer à remplir pleinement sa mission de force de proposition en collaborant étroite- ment avec le Gouvernement en vue d’une réduction rapide et palpable des charges admi- nistrativespesantsurlesentreprises.Lesefforts afférents des autorités seront suivis de près et évalués ensemble avec les entreprises ». * Le score global est la moyenne de sept indicateurs : activité des 6mois passés, activité, emploi, rentabilité et investissement des 6 mois à venir, ainsi que confiance dans l’entreprise et dans l’économie luxembourgeoise dans les 2 à 3 ans. Source :ChambredeCommerce Baromètre de l’Économie du 1 er semestre 2025 de la Chambre de Commerce Le Luxembourg, un pays en manque de réformes ? ©ChambredeCommerce L e ministre des Finances, Gilles Roth, s'est rendu à Bruxelles dans le cadre des réunions de l'Eurogroupe et du Conseil des affaires économiques et financières (Ecofin) du 7 au 8 juillet 2025. Les ministres des Finances de la zone euroont abordé la coordinationdes poli- tiques budgétaires, échangé sur le rôle international de l'euro et délibéré sur la proposition de la Commission relative à l'adhésion de la Bulgarie à la zone euro, qui devrait en devenir le 21 e membre en 2026. Enfin, l'Eurogroupe a rééluPaschal Donohoe à sa présidence pour un nou- veaumandat de deux ans et demi. Gilles Roth commente : « La réélection par consensus de Paschal Donohoe reflète la confiance des ministres de la zone euro en son leadership pragma- tique et sa capacité à garantir la stabilité économique. » En outre, un échange de vues a eu lieu au sein de l'Ecofin sur le paquet relatif à la monnaie unique notamment sur l'euro digital, ainsi que sur l'Union de l'épargne et des investissements. Les ministres des Finances ont discuté des recommandations dans le cadre du Semestre européen 2025 ainsi que de la mise enœuvredu cadrede gouvernance économique. Les ministres des Finances ont adopté les acteslégislatifspermettantàlaBulgariede rejoindre la zone euro début 2026. Cette réunion a également permis de préparer le mandat des ministres des Finances et desgouverneursdesbanquescentralesde l'Union européenne en vue de la réunion duG20 prévue à lami-juillet. Le Danemark a pris la présidence du Conseildel'Unioneuropéennele1 er juillet 2025et aprésenté sonprogrammede tra- vail ainsi que ses priorités aux membres de l'Ecofin. Source : ministère des Finances Gilles Roth à Bruxelles dans le cadre des réunions de l'Eurogroupe et de l'Ecofin à Bruxelles : « La Bulgarie rejoindra la zone euro début 2026 » ©MFIN

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