Agefi Luxembourg - novembre 2025
Novembre 2025 33 AGEFI Luxembourg Droit / Emploi L emarché du travail luxembour- geois reste un environnement attractif, aussi bien pour les en- treprises que pour les profession- nels. En dépit d’un léger ralentissement dans la croissance de l’emploi, la demande en talents dotés de compétences spéciali- sées reste importante. Telle est l’une des principales conclusions duGuide des Salaires 2026 récemment publié par Robert Half, spé- cialiste du recrutement. Les employeurs luxembourgeois continuentdeprivilégierlaqualité des profils et la spécialisation. Ils re- cherchent activement des professionnels possé- dant certaines compétences spécifiques et se disent prêts à les rémunérer en conséquence. « Nous constatons que les employeurs sur le mar- ché luxembourgeois se concentrent davantage sur le recrutement de talents disposant de compétences spécialisées », explique Géraldine Chatelle (portrait), Senior Talent Director chez Ro- bert Half. «Lemultilinguismeetl’expertisesectorielle sonttrèsdemandés,carilscontribuentàl’ef- ficacité opérationnelle des entreprises, à leur conformité et à leur esprit d’inno- vation. Bien que l’inflation et l’in- dexation du marché exercent une pression sur les salaires, les entre- prises repensent leurs packages de rémunération afind’attirer les compétences adéquates. Selon nos données européennes, 64 % des employeurs basent leurs sa- laires sur les références du mar- ché, alors que 67 % d’entre eux sont prêts à offrir une rémunéra- tionplusélevéeauxcandidatspos- sédant une expertise spécialisée. » Recruter plus intelligemment et récompenser davantage Trouver les talents adéquats reste un défi majeur, avecunefortedemandepourdesprofilsdanslesdo- maines de la finance, du risque, du droit, de la conformité et de l’informatique. Le Luxembourg conserve également son rôle de pôle international pour les candidats talentueux. Si les professionnels transfrontaliers occupent de nombreux postes à di- mension internationale, les fonctionsnécessitant une expertise locale restent fermement ancrées au Luxembourg. En conséquence, les entreprises défi- nissent des priorités plus précises en matière de re- crutement et prennent davantage de temps pour s’assurer de la compatibilité sur le long terme. Bien que le salaire reste un élément déterminant dans toute offred’emploi, les employeurs accordent désormais uneplaceplus importante à l’environne- ment de travail et aux avantages sociaux qui sou- tiennent le bien-être des employés afin de recruter les talents convoités. « Au-delà d’une rémunération compétitive, nous constatons que les entreprises proposent des avan- tages sociauxplus variés, commedes régimes de re- traite,uneassurancemaladie,desprimesetdesjours de congés supplémentaires », explique madame Chatelle. « L’ensemble de ces avantages joue un rôle clé dans l’attraction et la rétention des talents. » Transparence salariale enprogression Le Guide des Salaires révèle également que les né- gociations salariales occupent désormais une place plus importantedans ledéveloppement de carrière. Plus de la moitié des professionnels européens (52 %) se disent confiants pour discuter une augmen- tation salariale en 2026, même si 74 % d’entre eux éprouvent encore des difficultés, principalement pour justifier leur valeur ou développer de meil- leures compétences en matière de négociation. La loi sur la transparence salariale devrait favoriser une ouverture dudialogue autour de la rémunéra- tion. Grâce à des outils d’analyse comparative et à des données pertinentes, il sera plus facile pour les employeurs et employés d’avoir des discussions éclairées sur la valeur marchande. « La transparence et la confiance seront des thèmes déterminantspour2026»,conclutGéraldineChatelle. «Les entreprises qui combinent une communication claire avecune approche équilibrée enmatièrede ré- munérationetd’avantagesextralégauxconsolideront considérablement leur attractivité auprès des meil- leurs talents. » Guide : https://www.roberthalf.com/lu/en/insights/salary-guide Guide des Salaires 2026 de Robert Half Au Luxembourg, l’expertise est plus importante que jamais C haque année, leWorld Digital Competitiveness Rankingde l’International Institute forManagement Development (IMD) évalue la capacité des économies des cinq continents à adopter et développer les technologies numériques, qui transforment leur gouvernance et leursmodèles économiques. L’édition 2025, qui compare 69 éco- nomies, se distingue des précé- dentes par l’impactmarqué des ten- sions géopolitiques et de la frag- mentationdu commercemondial sur la compétitivité des entreprises. Ellemet en lumière les effets concrets des tensions commerciales sur des éléments clés tels que la propriété intellectuelle, les flux de données, les chaînes d’approvision- nement, les normes techniques et les régulations nationales. La Suisse domine le classement, alors que le Luxembourg doit accélérer le rythme Pour lapremière fois depuis le lancement du classement en 2017, la Suisse s’affiche en tête de classement , devant les États- Unis – de retour parmi les leaders à la 2 e place – et Singapour, qui cède sa pre- mière place pour occuper la 3 e marche du podium. La Suisse fait coup triple cette année en dominant le World Digital Competitiveness Ranking, le World Competitiveness Ranking et le World Talent Ranking. Partie de la 6 e place en 2020,laSuisseestainsiparvenueàdevan- cer sur le volet numérique, les États-Unis, plusieurs économiques européennes de pointe (Pays-Bas et Danemark) ainsi que des champions asiatiques (Singapour et HongKong). Le Luxembourg est 27 e (sur 69 écono- mies), derrière l’Estonie (26 e ) et devant la Nouvelle-Zélande (28 e ). Malgré un gain de 2 places par rapport à 2024, sa perfor- mance reste bien en-deçà de sa 21 e place de2019. LeGrand-Duchéfaitmoinsbien quesespaysvoisins .L’Allemagne,23 e en 2024,gagne5placesetsehisseàla18 e posi- tion. La France (21 e ) et la Belgique (25 e ), reculentrespectivementde1et4placesau classement général,mais restent devant le Luxembourg. Le capital humain reste le maillon faible duLuxembourg LeLuxembourgsemaintientàla24 e posi- tion sur le facteur « Knowledge » , der- rière le Japon (23 e ) et devant l’Espagne (25 e ). Si le pays a gagné 9 places l’anpassé par rapport à 2023, l’embellie ne s’est pas confirmée en 2025 et il reste derrière ses voisins : l’Allemagne (13 e ), la Belgique (20 e ) et la France (21 e ). SileGrand-Duchéaprogresséde2places sur le sous-facteur « Talent » , passant de la 37 e à la 35 e position, il s’agit du sous- facteur où le pays affiche son classement le plus mauvais du facteur « Knowledge ». Côté atouts, les chefs d’entreprises participants à l’ Executive Opinion Survey d’IMD font progresser le pays sur l’environnement pro-business desvillespourla2 e annéeconsécutive,fai- sant avancer le pays du 15 e au 12 e rang. Deplus,lesdirigeantsinterrogéssontsatis- faits de la capacité de l’économie luxem- bourgeoise à attirer les talents étrangers hautement qualifiés, le pays s’affichant à la4 e place,soitungainde9placesparrap- port à 2024. L’expérience internationale desmangersseniorsestégalementappré- ciée (7 e) . Côté faiblesses, l’enquête révèle queladisponibilitédescompétencesdigi- tales et technologiques reste un enjeu majeur pour les entreprises (36 e ). Cette contre-performance,récurrented’annéeen année,mérite une attentionparticulière. SileLuxembourgsedistingueparsacapa- cité à attirer les talents (salariés, étudiants et chercheurs), il doit désormaismieux les fidéliser. Parallèlement, il est essentiel de former les personnes déjàprésentes sur le territoire. Alors que l’essor des technolo- gies, en particulier de l’intelligence artifi- cielle, s’accompagne de l’automatisation croissante des processus de production et d’uneredéfinitiondesmétiersetdescom- pétences, cette transformation de l’orga- nisation du travail rend les initiatives de mise à niveau ( upskilling ) et de reconver- sion ( reskilling ) plus centrales que jamais. En outre, le pays estmal positionné sur la proportionde femmes chercheures (50 e ). Les résultats duLuxembourg sur le sous- facteur« Formation&éducation » sont en amélioration constante depuis 2022, le pays atteignant la 9 e place en 2025. Si l’on doit s’en réjouir, une analyse plus fine dévoile une situation mitigée. Le pays restepremiersurleratioélèves/enseignant dansl’enseignementsupérieuretsemain- tient à la 19 e position sur l’indicateur « Computer science education index ». Introduit en 2024, cet indicateur évalue quantitativement et qualitativement la capacitédesuniversitésàformerleursétu- diantsetàattirerdeschercheursderenom en informatique. La progression de 22 places en2ans (du50 e en2023au28 e rang en 2025) sur la proportion de diplômés dans les matières scientifiques et tech- niques est à saluer. En revanche, le pays restemal classé sur la priorité donnée à la formationdes employés. Sur cette indica- teur, le Grand-Duché reste à la 30 e place, faisant suite à une chute de 14 places en 2024(parrapportà2023).Faceàcettesous- performance, il est urgent de faire de la formation à tous les niveaux et dans tous les secteurs une priorité nationale. Surunenotepluspositive,laperformance du Luxembourg sur le sous-facteur « Concentration scientifique » s’amé- liore,lepayspassantdela28 e àla24 e posi- tion. Toujours à la 2 e place sur le nombre d’articles scientifiques publiés incluant le motclé« intelligenceartificielle »,lepays améliore légèrement son classement sur la part de son PIB dédiée aux activités de recherche et développement (R&D) (39 e , +2 places) et reste bien classé sur le nom- bre d’équivalents temps plein travaillant en R&D pour 1000 personnes (16 e ). Toutefois,ilreculetantsurl’aspect« R&D productivity bypublication » (le rapport entre le nombre d’articles scientifiques et les dépenses de R&D, exprimé en pour- centage du PIB) (59 e , -1 place) que sur l’octroi de brevets de haute technologie (28 e , -1 place). Faciliter l’accès aux financements : une urgence pour les entreprises Ala25 e placesurle facteur«Technology» , le Luxembourg perd 3 places par rapport à 2024 et s’éloigne de sa 14 e position de 2021. Le pays se place derrière la France (14 e ) et l’Allemagne (20 e ) et devance la Belgique(28 e ).Surcefacteur,lesÉtats-Unis ont ravi la première place à Singapour, Hong Kong occupant la 3 e marche du podiumcomme l’année passée. Sur le sous-facteur « Cadre réglemen- taire » , le Luxembourg gagne 5 places, mais reste cependant très éloigné de sa 8epositionde2021.L’avancéelaplusspec- taculaireconcernelenombredeprojetsde loi adoptés relatifs à l’intelligence artifi- cielle, où lepays atteint la15 e position, soit uneprogressionde24places.Lesrésultats de l’enquête demeurent relativement sta- bles en ce qui concerne la capacitédes lois sur l’immigration à soutenir le recrute- mentdelamain-d’œuvreétrangère(9 e ,+1 place) et de la capacité du cadre légal à favoriser le développement des applica- tionstechnologiques(18 e ,+1place).Al’in- verse, les chefs d’entreprises rétrogradent leGrand-Duchéàla20 e position(-5places) concernantl’applicationdesdroitsdepro- priété intellectuelle et jugent le soutien de l’environnementjuridiqueaudéploiement et à l’application des technologies très insuffisant (37 e , -18 places). S’agissant du sous-facteur « Capital » , l’érosion rapide de la compétitivité du Luxembourg se poursuit. Le pays a reculé de 31 places entre 2021 et 2025 pour occuper la 39 e place aujourd’hui. Si le Luxembourg est un des rares pays à disposer du tripleA, les dirigeants d’en- treprises tirent une nouvelle fois la son- netted’alarme. L’accèsdes entreprises au financement est un point noir du Luxembourg qui entrave son dévelop- pement économique et nuit à sa compé- titivité. Le pays recule de 3 places sur la disponibilité de financement pour le développement technologique (32 e ), après une chute de 7 places entre 2023 et 2024. Enoutre, lepays fait partiedespays les plus en retard (64 e ) s’agissant du sou- tien aux entreprises des services ban- caires et financiers. L’accès limité des entreprises aux fonds de capital-risque est également problématique (39 e ). Alors que leLuxembourgavait progressé de 17 places sur le sous-facteur « Cadre technologique » l’an passé, le pays décroche de 9 places en 2025 (26 e ). Sur la capacitédes technologiesde communica- tion (voix et données) à répondre à leurs besoins, les dirigeants d’entreprises la rétrogradentde7places(23 e ).Ala27 e posi- tion sur la vitesse moyenne de sa bande passante,lapertede13placesen1anlaisse à penser que d’autres pays rattrapent leur retard. Le classement du Grand-Duché dansl’utilisationdesréseaux4Get5G(19 e , -1 place) et le niveau de sécurité des ser- veurs internet (15 e , +1 place) sont relative- ment stables par rapport à 2024. Des entreprises agilesmais insuffisamment armées face aux cyber attaques Si le Luxembourg avance de 8 places en 2025 (32 e ), le facteur « Future readi- ness » reste unmaillon faible de l’écono- mie nationale. Là encore, le pays est à la traîne par rapport à ses voisins allemand (21 e ), français (26 e ) et belge (29 e ). Ces diffi- cultésàfairepleinementusagedelatrans- formation digitale sont particulièrement visibles sur le sous-facteur « Adaptative attitudes » (41 e ), caractérisé par un recours relativement limité aux services publics en ligne (53 e ), comparé à des pays comme le Danemark, l’Allemagne et le Royaume-Uni. Comme dans les éditions précédentes, les chefs d’entreprises poin- tent la vision largement négative de la mondialisationauseindelasociétéluxem- bourgeoise(39 e )etlemanquedeflexibilité et de capacité d’adaptationdes personnes face à de nouveaux défis (38 e ). A noter cependantungainde17placessurceder- nier indicateur. Les résultats duLuxembourg sur le sous- facteur« Businessagility » sontencou- rageants, le pays gagnant 12 places pour sehisseràla30 e position.Misàpartl’indi- cateurrelatifautransfertdeconnaissances entre entreprises et université (maintien à la31 e position),lesautresindicateursissus de l’enquête suivent tous une tendance à la hausse. L’amélioration la plus notoire concerne la capacité des entreprises à réa- gir rapidement aux opportunités et aux menaces (23 e , +16 places), suivie par leur utilisation des « big data & analytics » dansleurprisededécision(42 e ,+11places) et leur agilité organisationnelle (28 e , +7 places). Enfin, l’embellie sur la peur de l’échec d’entreprendre (12 e , +22 places) constitue une très bonne nouvelle pour la compétitivitédupays,laissantespérerune dynamiquedurablementpositivedansles prochaines années. Au25 e rangsurle sous-facteur« ITinte- gration » , le Luxembourg recule de 2 places, creusant ainsi l’écart avec sa per- formance de 2023 (10 e ). Ce sont principa- lement les résultats issus de l’enquête qui expliquent cette baisse avec, en ligne de mire, un manque de partenariats public- privé pour stimuler le développement technologique (37 e , -7 places) et un manque de prise en compte de la cyber- sécuritéparlesentreprises(35 e ,-12places). Ala23 e positionen2024,lepaysavaitdéjà chuté de 10 places (par rapport à 2023). Sur ce point en particulier, la Chambre avait insisté sur la nécessité de faire rimer robustesse économique avec sécu- rité informatique. En effet, 79% des PME luxembourgeoises sondées dans l’Eurobaromètre Flash 496 de la Commission Européenne de 2022, décla- raient ne pas avoir sensibilisé leurs employés à la cybersécurité au cours des 12mois précédents. Comme par le passé, les statistiques mettent en avant les diffi- cultés du Gouvernement à limiter les dommages issus des menaces cyber (maintien à la 41e place). A noter le gain de 7 places sur l’existence d’un cadre juri- dique de protection de la vie privée des utilisateurs d’internet (30 e ). Source: Chambre de Commerce IMD World Digital Competitiveness Ranking 2025 : Le Luxembourg doit accélérer le rythme
Made with FlippingBook
RkJQdWJsaXNoZXIy Nzk5MDI=