Agefi Luxembourg - mars 2025

AGEFI Luxembourg 30 Mars 2025 Fonds d’investissement Par Nadège DUFOSSÉ, CFA, Global Head of Multi-Asset, Candriam L ’exceptionnalisme américain en pause profite-t-il auxmarchés européen et chinois pour attirer les investisseurs ? Depuis une décennie, les marchés boursiers américainsdominentlargementlerestedu mondeenraisond’unefortedynamique du secteur technologique et d’un envi- ronnementmacroéconomiquepropice. Paradoxalement,depuisl’électionde DonaldTrump,cettetendances’est inversée et le marché américain semble avoir temporairement perdu ce rôle de leader. En date du 25 février 2025, le Nasdaq 100 reste très prochede sonniveaudedébut d’année tandisquetoutesles«Magnificent7» (1) horsMetaen- registrentdesbaisses.L’actionTesla,enbaissedeplus de 20% (2) illustre lafinde «l’effet Trump» sur lemar- ché américain. Lesinvestisseursréévaluentainsicetteannée leur stratégied’investissement, privilégiant désormais les actions européennes ou de certainspaysémergentscommelaChine. Cette évolution est confirmée par l’ana- lyse des flux du mois de janvier 2025 qui montre un net ralentissement des investissementsdans les actions améri- caines et plus particulièrement dans le secteurde la tech, auprofit de l’Eu- rope (à l’exceptionduRoyaume- Uni). LaChine attire également les investisseurs depuis l’an- noncedeDeepSeek,lesinvestis- seurs étrangers achetant les valeurs technologiques chinoises et délaissant l’Inde. Après unephasedepessimisme ex- trême sur lemarché européenau len- demain de l’élection américaine, la dynamiques’estinversée.Lavalorisationdesactions européennes est nettement plus faible comparée aux actionsaméricaines.Leratiocours/bénéficeajustépar secteurenEuropeafficheunedécotede23%parrap- port aux États-Unis, bien supérieure à la moyenne historique.Parailleurs,ladiversificationdesmarchés européens contraste avec la forte concentration des marchés américains autour des géants de la tech. Les marchés financiers en Europe sont aujourd’hui mieuxrépartisentrelessecteursfinanciers,industriels et les biens de consommation. Le contexte européen reste fragile et vulnérable tant sur le plan politique qu’économique. Cependant, à court terme, la fin du conflitenUkraine,lastabilisationdesprixdel’énergie etl’assouplissementbudgétaireenAllemagnesontau- tant de potentielles surprises positives qui attirent les investisseurs. Soutenue par uneBCEplus accommo- dante, l’économie européennemontre également des signes d’amélioration, notamment dans l’industrie manufacturière et la construction, tandis que les conditions de crédit s’améliorent. A plus long terme, les États-Unis conservent des atoutsmajeurs. L’innovation reste leur principal mo- teur, notamment dans la technologie et l’intelligence artificielle, qui offrent des perspectives de croissance à long terme. Les entreprises américaines se distin- guent par une rentabilité supérieure à celle de leurs homologues européennes, tiréepar unemeilleure al- locationducapital et unenvironnement économique plus dynamique. Il est probablement beaucoup trop tôt pour appeler à la finde l’exceptionnalisme améri- cain. Et ceci est renforcénotamment par le fait que les risques géopolitiques et économiques dépendent en grande partie des décisions politiques américaines, contre lesquelles les marchés boursiers semblent constituer, pour l’instant, le principal rempart. Danscecontexte,nouspréconisonsunestratégied’in- vestissementpluséquilibréeentrelesmarchésaméri- cains et européens. Une telle diversification nous semblepermettredemieuxgérerlesrisquesetdesai- sirlesopportunitésspécifiquesàchaquerégion.Nous avonsaccrunotreexpositionauxactionseuropéennes notammentdansdessecteurssous-évaluéstelsquela finance, l’industrie ou les midcaps allemandes. Ce- pendant,nousmaintenonsuneallocationdebaseaux actions américaines qui reste nécessaire en raison de leurs avantages structurels. Données au 24.02.2025 1)DéfiniescommeAlphabet,Amazon,Apple,Meta,Microsoft,Nvidia, Tesla. Source de la définition : USNews, 7 janvier 2025. 2) La performance de Tesla est mentionnée ici à titre d’exemple unique- ment et ne doit pas être considérée comme une recommandation d’in- vestissement ou un indicateur des tendances futures dumarché. L’exceptionnalisme américain peut-il perdurer ? Par Frédéric STOLAR,Managing Partner d’Altaroc L e Private Equity surperforme les marchés cotés grâce à plusieurs le- viersmécaniques qui lui permet- tent d’optimiser la rentabilité des entreprises qu’il acquiert. Parmi eux, la stratégie de buy andbuild joue un rôle central en consolidant des in- dustries fragmentées pour créer des leaders demarché. Par ailleurs, le Private Equity adopte une vision à long terme, contrairement aux in- vestisseurs desmarchés cotés, qui sont soumis à des impéra- tifs de performance trimes- trielle (épisode 2/3). La stratégie de buy andbuild, un accélérateur de valeur Lebuyandbuildconsisteàacquérirunacteurmajeur dans un secteur composé de nombreuses petites en- treprises,puisàracheterprogressivementsesconcur- rents pour structurer un ensemble plus puissant. Ce processus s’appuie sur plusieurs mécanismes ver- tueux. D’abord, le leader initial est souvent acquis à un prix raisonnable, par exemple 12 fois l’EBITDA. Ensuite, les petits acteurs sont rachetés à des valori- sations inférieures, souvent autour de 8 fois l’EBITDA, car ils ne bénéficient pas de la même taille critique. Une fois intégrés, ces concurrents voient instantanément leur valeur rehaussée au multiple du leader, générant ainsi un gain immédiat, appelé relution demultiple. À cela s’ajoutent les synergies créées par ces acquisitions successives. En mu- tualisant les infrastructures et les ressources, le nouvel ensemble réduit ses coûts et améliore sa rentabilité. Dans le secteur des la- boratoiresd’analysemé- dicale, cette approche a conduitàlaformationde trois grands groupes en France, alors que le marché était auparavant composé de milliers de structures indépendantes. En re- groupant les équipements et le personnel sur des hubsrégionaux,cesacteursrationalisentleursopéra- tionsetgagnentenefficacité,cequisetraduitparune baisse des coûts et unemeilleure compétitivité. Enfin, cette consolidation confère à la nouvelle en- tité une valeur stratégique supérieure à la somme de ses parties. Une plateforme leader ainsi consti- tuée peut croître plus rapidement, atteindre une rentabilité accrue et diversifier sa clientèle. À terme, son multiple de valorisation passe de 12 à 15 fois l’EBITDA, offrant une création de valeur significa- tive pour les investisseurs. Une approche qui dépasse le secteur de la santé Si les laboratoires d’analyse médicale illustrent bien cette stratégie, le buy and build est largement ré- pandu dans d’autres secteurs. Les cliniques, crèches, pharmacies ou encore cabinets de radiologie ont connu des consolidations similaires, pilotées par des fondsdePrivateEquity.Au-delàdelasanté,cetteap- proche a transformé des industries comme la certifi- cation, où Bureau Veritas et SGS dominent aujourd’hui unmarché autrefois éclaté, ou encore la location dematériel de chantier, où Loxamet Kilou- tou ont consolidé leurs positions en rachetant de nombreux acteurs régionaux. Ce modèle est difficilement accessible aux investis- seurs des marchés cotés. En effet, le gérant de fonds coté,investisseurpassif,nepeutpasparticiperàmet- treenplacecesstratégiescarellesnécessitentuneim- plication active et une capacité à structurer des acquisitions en série. Unhorizond’investissement tourné vers le long terme Unautre levier cléduPrivateEquity résidedans son approche du temps. Contrairement aux marchés cotés, où les investisseurs sont soumis àune évalua- tion trimestrielle, les fonds deLBOfonctionnent sur des cycles d’investissement de 5 à 7 ans. Ce temps long permet d’accompagner la transformation des entreprises et de maximiser leur potentiel de crois- sance. La rémunération des dirigeants reflète cette logique. Dans un fonds deLBO, les partenaires sont évalués sur leur capacité à atteindre un objectif de rentabilité d’au moins 10% par an sur la durée du business plan. En dessous de ce seuil, ils ne perçoi- vent aucune commission de performance. À l’inverse, les gérants de fonds cotés sont jugés sur leur capacité à surperformer l’indicede référence tri- mestre après trimestre, cequi lespousse àprivilégier des décisions à court terme. Cette différence d’ap- proche se traduit par des durées de détention radi- calement opposées : alors qu’un fonds de Private Equity conserve ses participations en moyenne 5 à 7 ans, la durée de détention d’une action en bourse est aujourd’hui d’environ 5 mois. Cette capacité à s’inscrire dans le temps long favorise la mise en place de stratégies industrielles solides et pérennes, alignées sur la réalité économique des entreprises. Une surperformance structurelle Grâce à ces mécanismes, le Private Equity bénéfi- cie d’un avantage structurel sur les marchés cotés. En combinant des stratégies de buy and build, des synergies industrielles et une vision à long terme, il génère des rendements supérieurs à ceux des indices boursiers traditionnels. Cette ap- proche permet non seulement de créer de la va- leur pour les investisseurs, mais aussi d’accompagner la transformation des industries et d’optimiser leur compétitivité. Les leviers de performance du Private Equity face aux marchés cotés By Andrei RĂDULESCU, Ph.D., Senior Macroeconomist T heworldmacroeconomic cli- mate has recently deteriorated, an evolutionmainly determi- nedby the high level of uncertainty, in the context of the economic policy decisions at the beginning of the newAdministration in the largest economy in theworld, with a nominal GDP of al- most USD30tn at the end of last year. On theonehand, thedecisions to increase the trade tariffs would have a negative impact for the world trade flows in the short-run, with un- favourable consequences for theprivate investments. In this respect, I point out that it took many quarters fortheglobaltradeflowstoaccommodatetheimpact and the consequences of the geo-political crisis in Ukraine. On the other hand, the accumulatingdiver- gences regarding theUkrainiancrisisdetermined the leaders of the European Union to signal ample pro- grammes for the increaseof themilitaryexpenditure, inaperiodwhentheeconomyoftheregioncontinues to be confronted with the long-lasting challenges – competitiveness and convergence. In fact, the increaseof theuncertainty level in1Q2025 is verywell reflected by the dynamic of the volatility indexontheUSstockmarket–theVIXindicator rose by more than 40% from the end of 2024 to mid-March 2025. The high level of uncer- tainty and the accumulating divergences among the largest economic powers in the world influence in a negative way the deci- sionsregardingtheinvestmentsacrossthepri- vate sector. In this context, the growthpace of theworld economy decelerated for the second monthinarowinFebruary2025, accordingtothePMI(Purchasing Managers’Index)Compositees- timatedbyS&PGlobal–down by 0.3 points compared to the level of January, to 51.5 points, the lowest level since December2023,ascanbeno- ticed in the followingfigure. One can notice the persistence of the divergence amongthemaineconomicpowersintheworldatthe beginning of this year. InUSAthePMIComposite indicatordeclined to51.6 points in February 2025, the lowest level since April 2024, an evolution determined by the uncertainty in- duced by the decisions and signals in terms of eco- nomic policy at the beginning of the new Administration, in a context characterised by a high level of the real financing costs.According to the esti- mates of the Federal Reserve (FED) the real interest rate for the 10 YRmaturity in US is close the highest levels since 2007, before the outbreak of the Great Fi- nancialCrisis(theworsteconomicandfinancialcrisis in theworldsince the endof the SecondWorldWar). Inthiscontext,theconsumerconfidencedecreasedto the lowest level since November 2023 in February 2025(accordingtotheindicatorestimatedbytheUni- versity of Michigan), while the probability for US economy to enter a recession in the short-run in- creased significantly since the start of the year, to around 40%at present. The deteriorating outlook for the US economy in the coming months is also sup- ported by the prospects for the continuity of the re- strictivemonetarypolicy. Ontheotherhand,theeconomyofChina(thesecond largestintheworld,withanominaldimensionofover USD18tn) grewfor the 16 th month ina rowinFebru- ary, by an accelerating pace, according to the Caixin General Composite PMI, which hit the highest level since November 2024. This evolution was also sup- portedbytheprospectsforthepolicymakersinBeijing toimplementnewmeasurestoimprovethedomestic demand in the short-run. In Euroland the economic activity continued to present a weak performance at thebeginningoftheyear,withthePMICompositein- dicator consolidating at 50.2 points in February, very close to the threshold that separates the contraction fromexpansion(50points),accordingtotheestimates of S&PGlobal. The economy of the region continues tobeconfrontedwiththedeteriorationoftheinterna- tional competitiveness and with the challenges in termsofthestructuraleconomicconvergenceamong themember countries. Inthiscontext,theEuropeanCentralBank(ECB)con- tinued the interest rate cut cycle at the secondmone- tarypolicymeetingof2025,byreducingthemonetary policy rate by 25bps to 2.50%, the lowest level since the end of 2022. In the first quarter of 2025 the eco- nomic divergence among the most important economies in the world maintained on the upward trend, an evolution also reflected by the dynamics of the real effective exchange rates of the USD, EUR, CNY, JPY, CHF, andGBP. The outlook for the world economy in the coming quarterswouldcontinuetodeteriorateunlessserious negotiations start among the representatives of the largesteconomiesinordertopromotepeaceandsup- port trade flows in theworld. At the end of this article, I emphasize the fact that, more than 80 years since the Conference in New Hampshire, the world needs another Bretton Woodsmomentummore than ever, very important for economic diplomacy, peace promotion, and in- telligent policies with positive impact for all the countries. World macroeconomic climate in deterioration in 1Q 2025 Source:representationoftheauthorbasedonthedataofS&PGlobal,March2025 PMI Composite indicator (points)

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