Agefi Luxembourg - février 2025

Février 2025 3 AGEFI Luxembourg Economie / Banques Suite page Une Il est envisagé de promouvoir de nouveaux produits pour les investisseurs de détail (tels qu’un compte « hybride » sur lequel pour- ront être déposés de l’argent, des titres et des contrats d’assurance, d’encourager l’épargne retraite et les fonds de pension et de faciliter la consolidation des marchés financiers. En outre, la Commission entend renforcer le marché européen de la titrisation, unifier davantage la surveillance financière, réformer les lois sur l’insolvabilité et supprimer les obstacles fiscaux à l’inves- tissement transfrontalier. La Commission instituera aussi une Union des compé- tences axée sur l’apprentissage tout au long de la vie et l’attrac- tion des talents en provenance de pays tiers. Elle encouragera également différents types de forma- tion pour faciliter et soutenir le travail transfron- talier au sein de l’UE. Enfin, la Commissionmettra en place un outil de coordination de la compétitivité afin d’aligner les politiques, investissements et initiatives de l’UE et des États membres. Dans un premier temps, cet outil se concentrera sur des secteurs clés tels que l’énergie, les transports, l’infrastructure nu- mérique, la biotechnologie et l’industrie manu- facturière essentielle, dans le but de promouvoir la coopération transfrontalière et la productivité à long terme. LaBoussole : unoutil àmuscler d’urgence Tout cela est bien beau. Mais qu’est-ce qui va in- verser un déclin de 15 ans ? Où est le kick et quels sont les leviers qui vont prolonger ce nouvel élan ? Pas la première directive Omnibus. En effet, même si celle-ci va dans le bon sens, elle ne concerne pas toute l’économie et va juste limiter une aggravation supplémentaire du déficit de compétitivité. Le dynamisme ne viendra pas non plus de la batterie de nouveaux textes annoncés dans la Boussole ainsi que dans le programme de travail du 12 février. Quant à la stratégie pour le marché intérieur, elle est floue et molle quand elle ne confine pas au gadget. Ainsi, le 28 ème régime ne sera ouvert qu’aux entreprises innovantes (une notion à défi- nir en outre) et requerra l’élaboration d’un droit européen de l’insolvabilité, du droit des sociétés, du droit du travail et du droit fiscal. Une entre- prise longue et colossale. En fait, il faut attaquer à la racine les problèmes fondamentaux que la Boussole identifie pourtant : les barrières au sein dumarché intérieur et la sur- charge réglementaire. Alors que nous avons l’avantage unique aumonde d’être unmarché de 450millions d’habitants sur un territoire compact, 85 %de nos entreprises n’ont pas d’activité en de- hors de leur État membre. Le marché intérieur a non seulement stagné mais régressé au cours des 15 dernières années. Par exemple, alors que les services représentent 70%du PIB aujourd’hui, au sein dumarché unique, les échanges transfronta- liers de services représentent moins d’un tiers de ceux des marchandises. Contrairement à ces der- niers, ils ne sont pas plus élevés que les échanges de services avec les pays tiers. À cet égard, il est temps de passer à un système comparable à la commercial clause américaine : tout bien ou service produit légalement dans un État membre pourrait être commercialisé dans un autre État membre, sans harmonisation préala- ble . C’est le principe de la reconnaissance mu- tuelle, qui aujourd’hui, n’existe pas, spécialement en matière de services. Cette mesure horizontale, qui requiert seulement un règlement de quelques articles, profiterait à toutes les entreprises de tous les secteurs et libé- rerait le potentiel productif et créatif dans l’UE. S’enclenchera une spirale positive. La perspective de toucher 450millions de clients au lieu de 10 ou 20 en moyenne incitera les entreprises à innover, investir et à grandir. Il en découlera des entre- prises plus fortes, plus dynamiques, offrant da- vantage de jobs de qualité, mieux rémunérés. Au-delà de la sphère économique, c’est toute la société européenne qui en ressortira plus confiante, plus forte, plus heureuse. Plutôt que d’élaborer de nouveaux textes… afin de simplifier les textes existants, une partie des fonctionnaires de la Commission pourra être af- fectée à la répression des infractions au marché intérieur par les États membres, qui se sont mul- tipliées depuis la crise bancaire. Une autre grande faiblesse européenne est d’avoir trop peu investi en RDI, sec- teur public et privé confondus. L’objectif de 3 % du PIB, déjà présent dans la stratégie de Lisbonne de 2000, n’a ja- mais été atteint. Nous sommes au- jourd’hui à 2,1 % pour 2,8 % aux États -Unis, plus de 4 % à la Chine et la Corée du Sud. Avec l’achèvement du marché inté- rieur, les entreprises investiront progressivement plus en RDI. Quant au secteur public – le grand absent du rapport Draghi et de la Boussole pour la compétitivité alors qu’il représe9nte aujourd’hui 50 % du PIB des 27 (!), il devrait être davantage responsabilisé. Il « suffirait » de fixer pour objectif un niveau de 3 % d’investissement RDI global (secteurs public et privé) aux États membres, ces derniers res- tant libres de la manière d’y parvenir. Pour le reste, modération normative au niveau européen avec un leitmotiv : nécessité d’une plus-value notable pour l’adoption de tout texte européen, notamment économique. Ce n’est que si les opérateurs économiques obtiennent des débouchés et/ou marges supplémentaires qu’il y a moyen de leur imposer d’en affecter une partie des charges environnementales et sociales. Enfin, plutôt que de nouveaux textes, il serait bon que les institutions privilégient des réalisa- tions concrètes là où le besoin s’en fait le plus sentir, du style de la Banque européenne d’in- vestissement, l’une des réussites majeures de la construction européenne avec ses 550 milliards d’euros d’encours, d’Airbus, d’EuroHPC, l’en- treprise commune en charge de supercalcula- teurs, d’infrastructures transfrontalières. Le défi de l’énergie – qui est plus récent que le déficit de productivité, s’ajoute à lui et l’aggrave – appelle aussi des solutions originales. Pour plus de développements sur ces questions, je me permets de renvoyer à mon essai « Les 5 Travaux d’Europe, une Europe qui nous fera grandir » publié chez Concurrences en avril 2024 (version anglaise en juin 2024), dont beaucoup d’analyses et de constats ont été confirmés par le Rapport Draghi, mais qui s’en distingue partiel- lement par les solutions préconisées, moins coû- teuses (pas de grand emprunt commun), plus respectueuses d’une société ouverte et d’une économie sociale de marché où la concurrence est libre, davantage fondées sur la liberté et la responsabilité. Philippe-Emmanuel PARTSCH EU Law Partner Arendt, Professeur de droit bancaire et financier européen (ULG-Paris II) (1) * https://lc.cx/zZ_zsA ** https://lc.cx/5EdlSA 1) Les opinions exprimées par l’auteur n’engagent que lui et non les collectivités dont il fait partie. La «Boussole pour la compétitivité de l’UE» : comment en faire un booster efficace ? For over 40 years Banque de Luxembourg Asset Servicing has been helping initiators to set up their investment funds in Luxembourg. Our specialist teams are ready to assist you with tailor-made services, expertise and unwavering support. Supporting fund initiators since 1983 BanquedeLuxembourg,sociétéanonyme–14,boulevardRoyal–L-2449Luxembourg–R.C.S.B5310

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