Agefi Luxembourg - mars 2025

AGEFI Luxembourg 28 Mars 2025 Fonds d’investissement Par Christophe POUCHOY, Gérant d’Echiquier Space, La Financière de l’Échiquier (LFDE) 2 025 est une année clé pour le secteur spatial. EnEurope, Ariane 6 vient de réussir son premier vol commercial, ce succès re- donne aux européens un accès souve- rain à l’Espace.Avec le succès du premier vol duNewGlennde BlueOrigin en janvier et les progrès continus du vaisseau Starshipde SpaceX, l’indus- trie spatiale vit une nouvelle ère de véhicules de lance- ment puissants et réutilisa- bles qui démocratisent l’accès à l’espace. Cette démocratisation ouvre également des perspectives as- tronomiques inédites pour les investisseurs. Une révolutionnourrie par des acteurs pu- blics et privés déterminés à écrire une nou- velle page de la course à la Lune et àMars. Un momentum favorable La reprise des dépenses liées au spatial et à la dé- fense sera centrale ces prochaines années. Ces secteurs bénéficieront du soutien du 47 e prési- dent des Etats-Unis, qui, rappelons-le, a fondé lors de son premier mandat la Space Force, la sixième branche des forces armées américaines. Compte tenu de la complexité industrielle des ac- tivités spatiales, les entreprises de défense sont bien positionnées : elles bénéficient de ressources humaines qualifiées auxquelles s’ajoute le soutien du gouvernement. Le domaine de l’exploration spatiale s’est appuyé sur les capacités industrielles de défense, avec la création d’agences spatiales gouvernementales travaillant aux côtés des ministères de la défense nationaux. Les solides perspectives du secteur seront soutenues en 2025 par divers catalyseurs, comme l’accélération des activités commer- ciales, nourrie par la volonté d’acteurs privés de construire des constellations en orbite basse ou de préparer les futures missions vers la Lune et Mars. Autre catalyseur clé pour 2025, l’augmen- tation des financements publics en- gendrés par la course à la Lune et le regain nourri de- puis l’élection de D. Trump se conjuguent à la baisse des coûts de lancement, notam- ment liée à la réutilisation des lanceurs qui améliore la ren- tabilité des activités spatiales. Un secteur en effervescence Au renouveau des financements publics s’ajoute ainsi le développement d’applications commer- ciales privées et l’émergence de véritables mo- dèles d’entreprises spatiales. Des fabricants de fusées, d’équipements, de semiconducteurs ou encore de logiciels de design de fusées aux satel- lites de communication et d’observation de la Terre, l’univers d’investissement s’étoffe en per- manence de nouvelles entrées en Bourse. Au sein d’un univers d’investissement de plus de 200 va- leurs analysées à ce jour, nous en sélectionnons une trentaine en nous appuyant sur une sélection précise des titres. Le secteur a gagné en maturité. Des sociétés qui consommaient encore beaucoup de trésorerie il y a trois ou quatre ans ont vu leur activité, leur taille et leur profitabilité augmenter. 85% des valeurs en portefeuille d’Echiquier Space ont ainsi au- jourd’hui un EBITDA positif (1) . Une stratégie pionnière En quête permanente d’innovation, LFDE a forgé une expertise pour détecter les grandes tendances de l’économie de demain. Avec Echiquier Space, première stratégie européenne dédiée à l’espace et à son écosystème, nous accompagnons les muta- tions de l’écosystème spatial depuis 2021, convain- cus que l’investissement dans cette thématique permettrade répondre àbiendes enjeuxplanétaires. Nous investissons dans tous les segments de l’éco- système spatial, aussi bien les fabricants de lan- ceurs, de satellites ou modules lunaires et leurs équipementiers que les fournisseurs de données géospatiales et les utilisateurs de ces données. Nous investissons également dans des sociétés technolo- giques qui fournissent les composants et logiciels essentiels au fonctionnement des fusées et satellites. Echiquier Space privilégie ainsi quatre profils d’entreprises : celles qui déploient leurs activités depuis l’espace, sur Terre, entre la Terre et l’espace, ainsi que celles qui développent des technologies transverses. Au sein de ces thématiques proprié- taires, nous nous intéressons aux pure players tels que Redwire, une entreprise spécialisée dans l’in- frastructure et l’innovation spatiales, fournissant des technologies et des capacités de production pour des missions civiles, commerciales et de sé- curité nationale. Ellemène notamment des projets R&D novateurs sur de la production industrielle et biomédicale en microgravité. Autre pure player de l’écosystème spatial, et déjà profitable, MDA développe des équipements de robotique spatiale qui sont notamment utilisés pour l’exploration spatiale, l’élimination des dé- bris, l’assemblage et la fabrication en orbite, ainsi que la logistique demobilité lunaire. Depuis 1988, cette entreprise canadienne fournit les différentes générations du bras robotique utilisé sur la Sta- tion Spatiale Internationale (ISS). MDA fabrique également certains sous-systèmes, antennes et ap- plications supplémentaires pour les constellations de satellites en orbite basse. En 2025, les lancements de fusées et la commer- cialisation des programmes seront les clés de l’es- pace. Une tendance majeure à laquelle nous sommes exposés avec notamment Rocket Lab, petit frère de SpaceX, spécialiste des petits lan- ceurs et développant Neutron, un lanceur de moyenne taille similaire au Falcon 9 de SpaceX ; l’ItalienAvio, spécialisé dans les systèmes de pro- pulsion, qui produit notamment les fusées Vega (petits lanceurs), ou encore Airbus dont la filiale Arianespace a confirmé la montée en puissance d’Ariane 6 après un premier lancement commer- cial réussi en mars. Sur le segment aérospatial et de défense, les lignes bougent. Les entreprises de défense développent de plus en plus leurs activités liées à l’espace. La Space Foundation a évalué la taille des dépenses spatiales militaires mondiales en 2023 à 57 mil- liards de dollars, soit une augmentation de +18% par rapport à 2022 (2) , tandis que le Forum écono- mique mondial a estimé la taille du secteur de la défense spatiale à 250 milliards de dollars en 2035 (3) . Les conglomérats européens de la défense, tels que Leonardo, Thalès, BAE Systems ouAvio, pourraient particulièrement bénéficier de la hausse des budgets militaires. Autres entreprises clés de l’écosystème, les socié- tés qui développent des technologies connexes es- sentielles à l’essor de l’industrie spatiale, à l’image de Nvidia. Acteur central de la fabrication de puces utilisées dans l’analyse des données spa- tiales, le leader américain travaille désormais à l’installation de capacités de calcul directement dans les satellites. Autre exemple avec Amazon dont la constellation Kuiper, qui fournit des ser- vices de connexion par internet, devrait devenir l’équivalent de Starlink. Les perspectives de croissance du spatial attei- gnent 9 à 10%par an (4) , avec des segments appelés à progresser plus rapidement. De quoi alimenter la croissance et le potentiel d’une thématique qui n’a pas fini d’ouvrir les horizons. 1) Donnée au 30.11.2024 2) Space Foundation, 2024 3)World Economic Forum, 2024 4) McKinsey & Company, Space: The $1.8 Trillion Opportunity for Global Economic Growth, Insight report,Avril 2024 2025, une année spatiale COVID-19 : cinq ans après L e 11 mars 2020, le Covid-19 est déclaré pandémie par l’Orga- nisationMondiale de la Santé. Cinq ans plus tard, trois experts de Carmignac analysent les séquelles lais- sées par ce choc historique sur l’économie mondiale, les marchés financiers et l’investissement durable. Impact économique Analyse de Raphaël GALLARDO, chef économiste Une perte irrémédiable du PIB mondial La pandémie a entraîné une baisse irréversible du PIB mon- dial d’environ 3% (1) en raison de pertes irrémédiables en capital humain et social dues aux décès, aux opportunités éducatives et de formation manquées, et aux faillites d’entreprises. Un fossé qui se creuse entre pays développés et émergents Les économies des pays endéve- loppement ont été sévèrement touchées en raisondumanquede marges de manœuvre budgé- taires etmonétaires pour amortir le choc. Par contre, les réponses décisives de la politique écono- miquedans lesmarchésdévelop- pés ont atténué les dommages économiques à long terme enna- tionalisant le risque de défaut du secteur privé. Les entreprises ont pu se concentrer sur la digitalisa- tion, ouvrant de nouvelles voies aux gains de productivité. Le retour de l’inflation Dans les économies occidentales, la monétisation des déficits bud- gétaires par les banques centrales a créé un excès de liquidité qui, trouvant sa voie vers l’économie réelle grâce aux transferts so- ciaux, a provoqué un réveil de l’inflation des biens et services. Cette irruption a ébranlé la vue complaisante des banques cen- trales sur lanature transitoiredes chocs d’offrenégatifs et a laissé la Fedendifficulté avec ses objectifs d’inflationmême cinq après. Fragilisation de la Pax Ameri- cana La pandémie a exposé les vulné- rabilités des chaînes d’approvi- sionnement hyper-mondialisées et exacerbé les tensions géopoli- tiques. La crise a ainsi accéléré la transition de l’ordre de la Pax Americana au désordre d’un monde multipolaire. Tensions sociales et domina- tion fiscale Les injections de liquidité ont tout d’abordnourri l’inflationdes prix des actifs en 2020-2021, dé- clenchant une aggravation des inégalités de richesse, terreau fer- tile pour un développement des mouvements populistes. De plus, la crédibilité des élites a été entachée par la gestion controversée de la crise sanitaire, ouvrant la voie à une contesta- tion politique des normes de gestiondes politiques publiques. En particulier, la socialisation des pertes liées aux confine- ments a banalisé l’illusion d’un endettement indolore des Etats en réponse aux chocs macroé- conomiques (bis repetita face au choc énergétique de 2022). Une telle dérive forcerait tôt ou tard les banques centrales à monéti- ser des dettes publiques deve- nues insoutenables, marquant l’entrée dans un régime de «do- minance budgétaire» où l’infla- tion deviendrait rapidement incontrôlable. Impact sur les marchés financiers AnalysedeKevinTHOZET,membre du comité d’investissement Le métronome de la consom- mation La mise sous cloche généralisée suivie d’une frénésie d’achat postconfinement a conduit à d’importantes fluctuations de ventes et des résultats pour les entreprises. Les espoirs de croissance des re- venus à deux chiffres se sont progressivement estompés. Pour autant, nous observons une transformation durable de la consommation des biens vers les services à mesure que l’éco- nomie croît. Une tendance qui a été amplifiée par l’environne- ment d’inflation élevée. Le contraste entre les constructeurs automobiles, qui pâtissent d’une baisse de la demande et d’une concurrence accrue, et les croi- siéristes, qui profitent d’une hausse des résultats en raison d’une popularité renouvelée et d’une capacité de place limitée, souligne cette transformation. Le saut quantique de la digita- lisation La pandémie a accéléré la digi- talisation dans divers secteurs, bénéficiant notamment à des en- treprises comme Microsoft, Apple et Alphabet qui ont dé- passé depuis les 2.000 milliards de dollars de capitalisation bour- sière. Les dépenses informa- tiques mondiales ont bondi de 4.000milliards de dollars en 2019 à plus de 5.000 milliards atten- dus cette année. L’explosion des usages des données a certaine- ment accéléré le développement de l’intelligence artificielle et son intégration subséquente au sein de divers secteurs sont plus ou moins synonyme de défis opéra- tionnels mais aussi d’avancées significatives. Le retour des défaillances d’en- treprises Le «quoi qu’il en coute» a large- ment contenu les taux de défauts pendant la pandémie. Mais de- puis ils ont augmenté régulière- ment. Si des secteurs comme l’immobilier où les laboratoires d’analyses continuent de faire face à de réels défis, les défail- lances d’entreprises sont compa- tibles avec une croissance de long terme. Lesmarchés du crédit offrent ac- tuellement des rendements at- tractifs mais nécessitent une attention particulière eu égard du risque de refinancement et des évolutions dans les chaînes d’approvisionnement. Le cycle économique est de retour L’adoption de politiques moné- taires restrictives pour contenir la vague inflationniste, a ali- menté le retour du cycle écono- mique, et de forts mouvements de prix des actifs financiers. Avec une volatilité accrue dans la corrélation actions-taux de- puis 2021, les investisseurs doi- vent désormais évaluer avec plus de diligence les sources de diversification de leur porte- feuille et encore davantage chercher à anticiper les in- flexions du cycle économique. Impact de l’investissement durable Analyse de Lloyd McALLISTER, responsable des investissements durables Impact environnemental net négatif Les ciels clairs et dégagés de pol- lution pendant la pandémie nous ont fait croire que les confi- nements ont été bénéfiques pour l’environnement, mais l’impact global du Covid-19 sur l’envi- ronnement a été globalement négatif. Les améliorations tem- poraires de la pollution de l’air, du bruit et de l’eau ont été éclip- sées par une augmentation ac- crue des déchets plastiques à usage unique. Amélioration de la préparation aux pandémies Alors que les systèmes de gou- vernancemodernes, la science et la technologie ont limité le nom- bre de morts du Covid-19 par rapport aux pandémies passées, les enquêtes post-pandémie ont identifié des échecs dans la pré- paration, dans la coordination internationale et dans le contrôle des infections. Malgré les améliorations, les épidémiologistes et virologues prédisent que la prochaine grande pandémie sera aérogène et surviendra probablement dans les 5 à 25 prochaines an- nées, avec des risques accrus dus aux changements de tempé- rature et aux phénomènes mé- téorologiques extrêmes. L’essor de la gestion systémique La chute du PIB mondial a mis en évidence l’importance de la gestion “systémique”, car la va- leur des entreprises au niveau d’un portefeuille peut dépasser leur valeur individuelle, comme l’ont montré les actionnaires des sociétés de biotechnologie dont les intérêts économiques dans les vaccins Covid-19 ont eu un impact significatif sur l’ensem- ble de l’économie. Cette perspective est désormais appliquée à des enjeux comme la résistance aux antimicrobiens et le changement climatique, où les entreprises sont évaluées en fonction des risques systé- miques et des rendements glo- baux du portefeuille plutôt que des profits individuels. L’investissement ESG arrivé à maturité La pandémie a coïncidé avec un essorde l’investissement durable, souligné par l’introduction du Règlement sur la publication des informations en matière de fi- nancedurable (SFDR) enEurope. Le nombre de fonds articles 8 et 9, qui prennent en compte les enjeux ESG de manière plus ex- plicite, a considérablement augmenté. 1) Banque mondiale, janvier 2025 ©Freepik

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