AGEFI Luxembourg - juillet août 2025
AGEFI Luxembourg 16 Juillet / Août 2025 Banques / Assurances L aBanque Internatio- nale à Luxembourg ac- célère sondéveloppe- ment sur lemarché français enouvrant une succursale de sa banque privée à Paris. L’équipe enplace travaillera en étroite collaboration avec le centre d’expertise du groupe situé à Luxembourg. Après plusieursmois consacrés à la planification et à la mise en place, la succursale de la BIL en Franceestmaintenantpleinement opérationnelle. Le bureau, situé à Paris, propo- sera une gamme de services sur- mesure à une clientèle compo- sée de particuliers et de familles fortunées, d’entrepreneurs et de family offices domiciliés en France. Composée de banquiers privés expérimentés, la succursale fran- çaise sera dirigée par Gabriel Bendayan. Ils travailleront en synergie avec les équipes de la banqueprivéeetdelabanqued’af- faires de la BIL basées à Luxembourg pour proposer des solutions de financement et d’in- vestissement,expertiseeningénie- riepatrimonialeetenstructuration internationale, fers de lance des services de la Banque. JeffreyDentzer,CEOdelaBanque Internationale à Luxembourg a commenté:«Renforcernotreacti- vitédegestionde fortuneà l’inter- national est une de nos priorités stratégiques. L’ouverture de notre succursale à Paris est une étape essentielle dans notre développe- ment sur le marché français, un marché-clé que nous connaissons bien et pour lequel nous pouvons apporteruneforteplusvalueànos futurs clients. » Claude Eyschen, Head of Wealth Management de la Banque Internationale à Luxembourg a ajouté : « Grâce à la collaboration étroite avec nos experts engestion de patrimoine et en banque d’af- faires, notre équipe en France pourra offrir à nos nouveaux clientsunegammedeservicesper- sonnalisés de la BIL. Que ce soit pourlagestiondeleurfortuneper- sonnelle ou le développement de leur entreprise, nos clients bénéfi- cieront du savoir-faire de la BIL. » L'ouverture de la succursale en France s'inscrit dans la stratégie 2025-2030 de la BIL visant à déve- loppersesactivitésdeBanquepri- vée sur plusieurs marchés euro- péens cléspour lesquels ellebéné- ficie déjà d’une grande expertise. Banque universelle luxembour- geoise, la BIL a pour ambition, dans les années à venir : - de renforcer ses servicesdans ses activités commerciales, que ce soit la gestion de fortune, la banque des entreprises et des institutions et la banque de détail ; - d’améliorer l'expérience client en optimisant son efficacité opéra- tionnelle,enintégrantlesdernières technologies et en proposant une largegammede services en ligne ; -etenfindecontinueràsoutenirle développement économique du Luxembourgenétantunebanque solideetfiablepourtoussesclients et partenaires. La BILouvre une succursale dédiée à la banque privée en France L a fréquence accrue des catas- trophes naturelles fait explo- ser les coûts de reconstruction enEurope, des coûts aujourd’hui très insuffisamment couverts par l’assurance. Face à ce constat alar- mant, laBanqueCentrale Européenne (BCE) et l’Autorité Européenne desAssurances (EIOPA) explorent activement des solutions coordonnées à l’échelle européenne. Leur ambition : bâtir une approche à plusieurs niveaux, combinant les capacités financières des assureurs privés et la solidité institutionnelle des acteurs publics pour renforcer la résilience collec- tive du continent. Les effets croissants du changement climatique Depuis les années 1980, l’Europe subit les effets du changement climatique à un rythme deux fois supérieur à lamoyenne mondiale (1) .Cetteaccélérationentraîneune hausserégulièredelafréquenceetdel’in- tensité des catastrophes naturelles (NatCat) et des phénomènes météorolo- giques extrêmes. Entre 1980 et 2023, ces événements liés au climat ont provoqué plus de 240.000décès et engendréplus de 900 milliards d’euros de pertes écono- miques dans l’UE (2) . Sans mesures fortes, ces pertes économiques pourraient tripler d’ici lafindusiècledansun scénarioopti- miste à +1,5°C, et exploser jusqu’à 15 fois leur niveau actuel si le réchauffement atteint 3°C (3) , une perspective de plus en plusprobableselonlesprojectionsscienti- fiques les plus récentes (4) . Undéficit de couverture assurantielle lourdde conséquences Au-delà des mesures préventives indis- pensablespour freiner le changement cli- matique, l’Europe doit aussi renforcer sa résiliencefinancièrefaceauxcatastrophes naturelles. Dans ce contexte, la BCE et l’EIOPA ont récemment publié un rap- port commun exposant des pistes concrètes pour combler le « déficit de couverture assurantielle », c’est-à-dire la part des pertes économiques dues aux événements extrêmes qui n’est pas cou- verte par les assurances. (5) Sur la période 1980-2023, moins de 20 % des pertes économiques liées aux catas- trophes climatiques étaient assuréesdans l’UE,avecd’importantesdisparitésnatio- nales : moins de 2 % en Roumanie, plus de 65 % au Danemark, ou encore 50 % au Luxembourg (voir carte ci-après). Cettehétérogénéitéseretrouveégalement à l’échelle individuelle : selon l’enquête Eurobaromètre 2024 (basée sur des don- nées de juillet 2023), seuls 19 % des Européens disposent d’une assurance contre les dégâtsmatériels provoqués par les catastrophes naturelles, avec une cou- verture variant de 8%en Espagne à 59% auLuxembourg. (6) L’intensification des catastrophes natu- relles s’accompagne aussi d’une hausse marquéedescoûtsdecouverture:lestaux de réassurance pour les risques immobi- liers liés aux NatCat ont ainsi augmenté de 65 %depuis 2017 (7) . Cette inflation des coûts de réassurance s’explique par plu- sieurs facteurs: d’une part, la nécessité pour les assureurs de constituer des réservesplusrobustespourfairefaceàdes sinistres d’ampleur croissante ; d’autre part,leslimitesactuellesdelamodélisation des événements extrêmes, qui complexi- fientlatarificationdurisque.Àcelas’ajou- tent les futures exigences réglementaires liéesàlarévisiondeladirectiveSolvabilité II, attenduepour 2026. Cette réformepré- voit notamment une révisiondes facteurs de risque associés aux catastrophes natu- relles dans le calcul du capital réglemen- taire. Certains pays, comme le Luxembourg,quin’étaientprécédemment pas inclusdans le calcul durisqued’inon- dation, verront désormais ce péril intégré dans la formule standard, reflétant une reconnaissance accrue de leur exposition réelle à ce risque. (8) Résultat:l’assuranceNatCatdevientpro- gressivement inabordable pour les ménages modestes, dont le taux de cou- verture est passé de 14 % à 8 % en trois ans. Si aucune mesure préventive n’est mise en place, l’écart de protection ne pourraque se creuser, avecdes répercus- sions systémiques : ralentissement des reprises économiques post-sinistres, exposition accrue des banques au risque de crédit, et pression croissante sur les finances publiques pour compenser les pertes non assurées. L’assurance, levier de prévention face aux catastrophes naturelles En l’absence de couverture assurantielle, lesménagesetentreprisestouchéspardes catastrophesnaturellesdépendent princi- palementdel’aidepublique,souventcom- plétée par des subventions européennes. Cette dépendance exerce une pression croissante sur les finances publiques et peut décourager la mise en œuvre de mesures préventives, tant auniveau indi- viduel qu’institutionnel. La BCE et l’EIOPA mettent en garde contre ce phénomène de « moral hazard », où l’anticipation d’un soutien étatique post-catastropheréduitl’incitationàadop- terdesstratégiesderéductiondesrisques. Pour y remédier, elles préconisent l’inté- gration de mécanismes incitatifs dans les contrats d’assurance, tels que des primes moduléesenfonctiondesmesuresdepré- vention mises en place par les assurés. Cette approche, connue sous le nom « impact underwriting », vise à encourager lescomportementsproactifsenmatièrede gestiondes risques. Protections publiques pour compléter l’assurance privée Faceàdesévénementsclimatiquesdeplus enplusextrêmes,laBCEetl’EIOPAsouli- gnent que la couverture intégrale des risques naturels dépasse les capacités du seulsecteurprivé.Ellesplaidentpourune approcheàplusieursniveaux:l’assurance privée constituerait la première ligne de défense, renforcée par des partenariats public-privé et des dispositifs publics à l’échelle nationale et européenne. Cette vision est partagée par Insurance Europe , qui appelle les pouvoirs publics à assumerunrôlemoteurdanslaréduction du risque. Cela inclut l’instauration de normes de construction plus résilientes, ainsi que des ajustements réglementaires permettantauxassureursdeproposerdes primes abordables malgré la hausse des coûts liés aux sinistres. (9) L’expérience montre que les pays de l’Espaceéconomiqueeuropéen(EEE)dis- posant d’un régime national d’assurance contre les catastrophes naturelles présen- tent une part de pertes assurées plus éle- vée(environ47 %,contremoinsde18 % dans les pays sans tel dispositif). Huit États en sont dotés à ce jour, et l’Italie rejoindra cette liste en 2024, à la suite des inondations en Émilie-Romagne. Le Luxembourg constitue une exception notable : il affiche une couverture relati- vementélevéemalgrél’absencederégime national spécifique. (10) La majorité de ces dispositifs prennent la formederégimespublicsde(ré)assurance, souvent obligatoires, combinant soutien étatiqueetrecoursàlaréassuranceprivée. Cette structure permet de mutualiser les risques à grande échelle et d’assurer une couverture même dans les zones forte- ment exposées. Toutefois, la hausse sou- tenue des primes sur les marchés de la réassurance—portée par l’augmentation delafréquenceetdelagravitédessinistres — met ces mécanismes sous tension. Le financementpublicrequisdevientdeplus enpluslourd,soulevantdesinterrogations croissantes sur leur viabilité financière et leur résilience à long terme. Un cadre européen renforcé : partenariats public-privé et mutualisationdu risque Pour faire face à l’augmentation des risques liés aux catastrophes naturelles, la BCE et l’EIOPA appellent à élargir le rôle despartenariatspublic-privéàl’échellede l’Union. Cette approche vise à combiner l’expertise technique des assureurs — notamment en modélisation des risques — avec des politiques publiques plus ambitieuses, comme des normes de constructionadaptéesauxnouveauxaléas climatiques. D’autres leviers, tels que l’émissiond’obligationscatastrophes,sont également envisagés pour diversifier les sources de financement et mieux transfé- rer le risque auxmarchés de capitaux. Au-delà des dispositifs nationaux, le rap- port proposeuncadre structuréà l’échelle européenne reposant sur deux piliers. Le premier serait un régime de réassurance public-privé européen, inspiré des modèlesnationauxexistants,visantàren- dre l’assurance NatCat plus accessible et plusabordablepourlesménagesetentre- prises. En mutualisant les risques à l’échelle de l’UE, ce système permettrait deréduirelescoûtsd’information,decapi- tal et d’exploitation. Selon l’EIOPA, ce regroupement pourrait faire baisser les primes de 26 % en moyenne, avec un impact particulièrement positif pour les petits Étatsmembres. Leschémapublic-privédel’UEseraitéga- lement soutenu par un deuxième pilier, qui prendrait la forme d’un fonds public decatastrophedel’UE.Cefondsfournirait uneaidefinancièrerapideencasdedom- magesàdesbienspourlesquelsuneassu- rance privée serait trop coûteuse, comme les infrastructures publiques. Certaines structures sont déjà en place, comme le Fonds de solidarité de l’UE, qui a prouvé sonutilité,bienquedeplusenplusinsuffi- sante, en fournissant des paiements aux gouvernements des Étatsmembres après des événements catastrophiques. Depuis sa création en 2002, le Fonds de solidaritéde l’UEaversé environ8,6mil- liards d’euros pour répondre à plus de 130 catastrophes majeures dans l’Union. Rien qu’en 2023 et 2024, plus de 10 % de ce montant ont été alloués à cinq États membres particulièrement touchés par des inondations—notamment la Grèce, la France, l’Italie, l’Autriche et la Slovénie (11) . Toutefois, ces aides ne repré- sentent qu’une part marginale des coûts réels de reconstruction, estimés à 23mil- liardsd’eurospour ces seuls événements, illustrant les limitesde la réponseactuelle face à l’ampleur croissante des dom- mages climatiques. Vers unnouveaupacte européendu risque ? Les propositions conjointes de la BCE et de l’EIOPA marquent un tournant dans la façon dont l’Union européenne envi- sage la gestion du risque climatique : ni délégation complète au marché, ni pro- tection universelle inconditionnelle, mais un équilibre à construire entre mutuali- sation, incitation et solidarité. En s’ap- puyantsurlesforcesdusecteurprivétout en structurant l’intervention publique, l’Europe pourrait enfin commencer à combler son déficit assurantiel. Mais ce chantier pose aussi des questions stratégiques majeures : jusqu’où les assu- reurs doivent-ils aller pour continuer à couvrir l’incertain ?Quel rôle l’UE est-elle prête à assumer dans la protection finan- cière de ses citoyens face aux chocs clima- tiques ?Et, plus largement, sommes-nous prêts à redéfinir collectivement ce que signifie « un risque assurable » à l’ère du dérèglement climatique ? Florian ADJEDJ, Senior Manager, Risk Consulting Brice BULTOT, Partner, Insurance Leader EY Luxembourg 1) European State of the Climate Report 2024, The CopernicusClimateChangeService 2) Economic losses from weather- and climate-related extremes inEurope,EuropeanEconomicAgency 3) The Fiscal Impact of Extreme Weather Events, EuropeanCommission 4) World on track for catastrophic 3 degrees Celsius warming,UNwarns,POLITICO 5) Towards a European system for natural catastrophe riskmanagement,ECBandEIOPA 6) Consumer trends in insurance and pension services, EIOPAbarometer 7) Guy Carpenter Regional Property Catastrophe Rate- On-LineIndex,Artemis 8)2023/2024(RE)ASSESSMENTOFTHENATCAT STANDARDFORMULA,EIOPA 9)ResponsetotheECB-EIOPAdiscussionpaperonpol- icy options to reduce the climate insurance protection gap,InsuranceEurope 10) Dashboard on insurance protection gap for natural catastrophes,EIOPA 11)Fivecountriestoreceiveover€1billioninEUaidfol- lowingnaturaldisasters,EuropeanParlamentNews Assurabilité climatique : l’Europe cherche l’équilibre entre solidarité et viabilité de gauche à droite : FlorianADJEDJ et Brice BULTOT, EYLuxembourg Part moyenne des pertes économiques couvertes par l’assurance lors de catastrophes naturelles dans l’UE (1980–2023), Source :BCEetEIOPA
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