Agefi Luxembourg - novembre 2024
Novembre 2024 15 AGEFI Luxembourg Economie Suite page de gauche En Chine communiste, le Parti contrôle les forces ar- mées, les cadres et l’information, avec une effrayante sophistication.Lesmédiaslibresetlesnouvellestech- nologiesdel’informationpeuventjouerunrôlelimité enfaveurd’institutionsplusinclusives,maisseuleune large mobilisation et une organisation de la société peut imposer un changement des institutions poli- tiques, dumodèle extractif vers lemodèle inclusif.” (25) L’inclusivité décroissante des institutions européennes et ses conséquences NiM. Letta, niM. Draghi, niM me Lagarde, ni les au- torités européennes, ni celles des États membres ne semblent s’être posé la question de savoir si le dé- crochagede l’Europe ne vient pas d’institutions po- litiques et économiques de l’UE demoins enmoins inclusives et compétitives, notamment par rapport aux institutions fédérales des États-Unis d’Amé- rique. Celles-ci ont permis de réaliser un marché unique des biens, des services, de la finance, etc., et unemeilleuremobilité des travailleurs, propices au développement économique, ce que n’a pas com- plètement su faire la gouvernance européenne, as- semblage de supranationalité et d’intergouverne- mentalisme. Ce dernier favorise la sauvegarde des intérêts nationaux, l’idée thatchérienne du ‘juste re- tour’ du budget européen, et dénote une mentalité et un comportement extractif et pas inclusif. La politique agricole commune de l’Europe est de plus en plus extractive : l’écart de revenu entre les plus grandes et les plus petites exploitations agri- coles d’Europe a doublé au cours des 15 dernières années ; deplus, lenombred’exploitationsdemoins de 30 hectares a diminué d’un quart au cours des années 2010, selonEurostat. (26) Mise enplace en1962 pour garantir la sécurité alimentaire du continent et des prix minimums aux producteurs, donc inclu- sive, la politique agricole commune a vite favorisé la surproductionet négligé l’environnement. Elleva nous coûter plus du tiers dubudget de l’UEpour la période 2021-2027, soit 386,6milliards €. Sa réforme de 2023 pour la rendre plus « verte » a suscité la co- lère des agriculteurs ; elle s’est en outre révélée ina- déquate pour faire face aux conséquences de la guerre enUkraine. L’efficiencedesdépensesdedéfense enEurope reste très basse. Comme il n’y a pas d’État fédéral euro- péen et donc pas de défense européenne, ces dé- penses sont celles des États membres, au total 350 milliards € en 2024. Le marché européen des équi- pementsdedéfense restedonc fragmenté tant auni- veau de la demande qu’au niveau de l’offre, car seuls quelques producteurs européens d’équipe- ments de défense comptent sur la scène mondiale. Cela rend très déséquilibré en notre défaveur le commerce transatlantique dans ce domaine, ce qui diminue notre PIB. Sous la pression de l’OTAN et de la guerre en Ukraine, nos budgets de rééquipe- ment des forces armées ont beaucoupaugmentéde- puis 2022, mais principalement au profit de quelques entreprises géantes américaines. Ils sont de plus en plus extractifs. Mêmesilaréalitéestbeaucouppluscompliquéeque celle décrite par MM. Acemoglu, Johnson et Robin- son, etmême si les institutions américaines sont loin d’être parfaitement inclusives, et risquent de le de- venir moins encore avec le président nouvellement élu, (27) lesmédias et l’opinion publique devraient in- citer les gouvernants européens à s’inspirer des constatations faites par les lauréats du “prix Nobel d’économie” 2024 : l’Europe a besoin de plus d’in- clusivité, ce qui passepar unmeilleur accès à l’infor- mation, plus de démocratie, moins de technocratie. Un autre jugement sévère pour l’UE, mais tout aussi juste Il n’y a pas que notre décrochage sur les plans tech- nologique et économique àdéplorer : sur la scène in- ternationale, dans le domaine géopolitique, l’UE n’existe pas. Le 24 octobre 2024, lors de la conférence qu’il a donnée à l’occasion de l’ouverture de l’année académique 2024-2025 de l’Institut d’études euro- péennesdel’UniversitélibredeBruxellessurlethème des transitions justes enEurope, j’ai noté cequ’adit le professeur Eloi Laurent, économiste, à propos du maintiende lapaix. Il adéclaréque l’actualitédevrait donner auxEuropéens legoût depréserver lapaix. Il s’est dit très étonné de la faiblesse des efforts diplo- matiques européens dans ce qui se passe auMoyen- OrientauregarddeseffortsdéployésenUkraine.Ila jugé que la contradiction quotidienne sur la position européenneparrapportàcesdeuxconflitsdiscrédite la diplomatie européenne et que cela finira par dé- truire l’UE elle-même, car elle a été construite sur l’idéal de paix. Si l’UE n’est pas capable d’être un agent de la paix et des droits humains, d’intervenir concrètement, de s’interposer pour protéger les po- pulations civiles à Gaza et désormais au Liban, ça veut dire pour Eloi Laurent qu’elle n’est pas fidèle à sa vocation historique qui lui a notamment valu le prix Nobel qu’elle a reçu en 2002 pour avoir œuvré en vue de la paix sur le continent, en garantissant les libertés civiles et les droits politiques. 1)ÉricAlbert,PhilippeEscande,BéatriceMadeline,ChristineLa- garde, présidente de la BCE : « Le décrochage de l’Europe est une réalité, celui de la France aussi » in Le Monde , https://lc.cx/OeDFjQ ,31octobre2024. 2)TheRoyalSwedishAcademyofSciences,“TheBankofSwe- den Prize in Economic Sciences in Memory of Alfred Nobel 2024”, PressRelease ,https://lc.cx/FqghLq, 14October2024. 3)VoirDaronAcemoglu,JamesA.Robinson, WhyNationsFail : The Origins of Power, Prosperity, and Poverty, New York, Crown Business, 2012, Prospérité, puissance et pauvreté : Pourquoi certains pays réussissent mieux que d’autres , traduit par Patrick Hersant, Genève,MarkusHaller,2015. 4)PhilippeAghion,“Préfaceàl’éditionfrançaise”inDaronAce- moglu,JamesA.Robinson, WhyNationsFail:TheOriginsofPower, Prosperity, and Poverty, New York, Crown Business, 2012, Prospérité, puissance et pauvreté : Pourquoi certains pays réussissent mieux que d’autres , traduit par PatrickHersant, Genève, Markus Haller,2015,p.13-14. 5)VoirDaronAcemoglu,JamesA.Robinson,Pourquoicertains paysréussissentmieuxqued’autres,op.cit.,p.140. 6)Ibidem,p.20. 7)Ibidem,p.65. 8)Ibidem,p.66. 9)Ibidem,p.97. 10)Ibidem,p.111-112. 11)Ibidem,p.490-492. 12)Ibidem,p.502-523. 13)Ibidem,p.527. 14)Ibidem,p.527-528. 15)Ibidem,p.528-529. 16)Ibidem,p.531. 17)Ibidem,p.534. 18)Ibidem,p.538. 19)Ibidem,p.542. 20)Ibidem,p.542-543. 21)Ibidem,p.546-551. 22)Ibidem,p.551-555. 23)Ibidem,p.556. 24)Ibidem,p.557-562. 25)Ibidem,p.563. 26)AjitNiranjan ,“Revealed:thegrowingincomegapbetween Europe’s biggest and smallest farms” in The Guardian , https://lc.cx/fCBJFI, 2November2024. 27) ElonMusk, le fondateur de Tesla et de SpaceX, amis toutes sesforcesetcellesdeX(ex-Twitter)dontilestdevenuleproprié- taire,dansl’électionprésidentielle,pourfairegagnerM.Trump. Enretour,SpaceXescompteplusieurscontratsdansledomaine spatial militaire. Dès le 10 novembre, les dirigeants d’Amazon, Google,Apple,Microsoft,OpenAI,ontclamé«avoirhâtedecol- laborer » avec la nouvelle administration, pour favoriser l’inno- vation et renforcer le « leadership » américain. Voir Alexandre Piquard, “Élection de Trump : les géants de la tech pourraient tirer profit de son second mandat” in Le Mond e, https://lc.cx/NkRstQ, 8novembre2024. D es signaux positifs pour le Luxembourg et sa place financière àNew York et de nouvelles impulsions de croissance pour l'économiemon- diale lors des assemblées annuelles du FMI et de la Banquemondiale à Washington.» Tel est le bilan en- courageant duministre des Fi- nances, Gilles Roth, à l'issue de son déplacement aux États-Unis du 20 au 25 octobre 2024. La première étape duministre et de son équipe a été une mission financière à NewYork du 20 au 23 octobre 2024 avec Luxembourg for Finance. Retour positif des institutions financières américaines Dans la capitale de la finance mondiale, le ministre a rencontré les dirigeants d'importantes institutions financières américaines, notamment pour s'échan- ger sur leurs activités en Europe. Il s'est également entretenu avec des représen- tants de la bourse de New York (New York Stock Exchange) ainsi que du Pro- grammedesNations unies pour ledéve- loppement (PNUD) pour un échange axé sur la finance durable. Gilles Roth a commenté : «Les États- Unis sont l'un de nos principaux mar- chés. Avec 20% des actifs sous gestion, rien que dans l'industrie des fonds. Toutes les grandes institutions finan- cières américaines sont aujourd'hui pré- sentes au Luxembourg, la place financière agissant en tant que centre de compétences pour ces groupes. Plu- sieurs banques américaines nous ont re- joints récemment parce que nous connaissons une forte croissance, no- tamment dans le domaine des fonds al- ternatifs. De plus, j'ai reçu un retour positif de tous mes interlocuteurs sur leurs activités dans notre pays.» Par la suite, le ministre a participé aux Assemblées annuelles du Fonds moné- taire international (FMI) et de la Banque mondiale àWashington. Dans un environnement macroécono- mique incertain, les ministres des Fi- nances des 191 pays membres des institutions de Bretton Woods ont mis l'accent sur la relance de la croissance mondiale, la mobilisation du secteur privé ainsi que sur la création d'emplois. Les autres thèmes abordés ont été les ni- veaux d'endettement élevés, les transi- tions verte et numérique ainsi que la lutte contre la pauvreté. Conventionde non-double imposition avec l'Argentine et atmosphère productive Enmarge des réunions annuelles, lemi- nistre des Finances a signé une conven- tion de non-double imposition avec son homologue argentinLuis Caputo. Gilles Roth a également rencontré le Premier ministre et ministre des Finances du Liechtenstein, Daniel Risch, et s'est échangé sur lesdéveloppements géoéco- nomiques avec le représentant ukrainien auFMI, VladyslavRashkovan. Ensemble avec ses collègues européens, il a parti- cipé à un dîner organisé par la directrice générale du FMI, Kristalina Georgieva. Enfin, leministre apuéchanger avecdes représentants du secteur financier au sujet des futures opportunités pour le Luxembourg et l'Europe. «L'atmosphère ici àWashington au FMI et à la Banque mondiale a été très pro- ductive. Il est important de relancer maintenant la croissancemondiale. Pour maintenir un État social fort pour nos ci- toyens», a concluGilles Roth. Source : ministère des Finances Gilles Roth tire un bilan positif à l'issue de son déplacement aux États-Unis «Des signaux positifs pour le Luxembourg et sa place financière » ©MFIN « L es 11 et 12 novembre, S.A.R. leGrand-Duc héritier et le Vice-Premierministre, minis- tre desAffaires étrangères et du Commerce extérieur, Xavier Bettel, ont effectué une visite de travail à Lisbonne, où ils ont assisté auWeb Summit, considéré comme l'une des plus grandes conférences tech- nologiques aumonde. Au Web Summit, S.A.R. le Grand-Duc héritier et le ministre Bettel ont rencontré desreprésentantsdumondeéconomique et politique lors d'échanges bilatéraux. LeministreBettel aensuiteparticipéàun panel avec leministre desAffaires étran- gères du Portugal, Paulo Rangel, sur le thème «Balancing technology, trust and democratic values». Au cours de la dis- cussion, les deux ministres ont évoqué différents moyens et politiques pour maintenir et restaurer la confiance du public dans les institutions démocra- tiques, en examinant en particulier com- ment l'innovationet lesvaleursdémocra- tiques peuvent prospérer ensemble. S.A.R.leGrand-Duchéritieretleministre Bettel, accompagnés par le président de la Chambre de Commerce, Fernand Ernster, ont par la suite visité des stands dedifférentspays,organisationsetdecer- taines start-up. Ils ont ainsi visité le stand des start-up Artzap.AI et Quasible.AI avant depasserpar le standde laBanque européenned'investissement. Ladéléga- tion s'est ensuite rendue sur le stand du Cabo Verde et de la Serbie, avant de ter- miner l'après-midi par une visite du stand portugais. En marge de la conférence, le ministre Bettel a eu une réunion bilatérale avec le ministredesAffairesétrangèresportugais, PauloRangel.Lorsdeladiscussion,lechef de la diplomatie luxembourgeoise et son homologue se sont penchés sur l'actualité internationaleeteuropéenneainsiquesur les excellentes relations bilatérales entre le Luxembourg et le Portugal. Àcette occasion, leministre Bettel a souli- gné le caractère amical sur lequel se fon- dent les relations entre les deuxpays : «Le Luxembourget lePortugal partagent une amitié de longue date, qui se perpétue encore aujourd'hui. Bien que séparés par une certainedistancegéographique, nous sommes unis par nos valeurs et nos posi- tions communes.» Enfin,leministreBettelaégalementeuun échange de vues avec le ministre de l'Économie du Portugal, Pedro Reis. Les ministresontnotammentdiscutédesrela- tions économiques entre le Luxembourg et le Portugal et de lamanière dont celles- ci pourraient être renforcées à l'avenir. ministère desAffaires étrangères et européennes, de la Défense, de la Coopération et duCommerce extérieur S.A.R. le Grand-Duc héritier et Xavier Bettel au Web Summit à Lisbonne «Le Luxembourg et le Portugal partagent une amitié de longue date » ©MAELuxembourg
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